Les verres décorés d’émail, de filets blancs ou « dorés » dans le sud de la France (XVIe siècle) : état de la documentation archéologique et historique
p. 131-146
Résumés
Résumé. Des études récemment menées sur l’artisanat verrier à l’époque moderne dans le Sud de la France ont permis de renouveler certaines problématiques en lien avec les savoir-faire, notamment ceux des verres décorés d’émail, de dorure ou de filets blancs au XVIe siècle.
Les données archéologiques sont encore peu nombreuses et le déséquilibre avec les régions septentrionales, important. À l’inverse, la documentation écrite ancienne s’est avérée abondante : elle atteste à la fois une importante production et un indéniable savoir-faire de la part des artisans locaux, a priori affranchis des migrations verrières italiennes.
Aussi, un état de la question était indispensable pour montrer les particularités régionales ainsi que les ambiguïtés qui existent entre les sources écrites et la réalité des découvertes archéologiques.
Summary. Recent studies conducted with regard to the glass-making craft industry in modern times in the South of France have brought new light to certain issues linked to technological know-how, in particular those concerning glasses decorated with enamel, gilt and white trails in the 16th century.
The archaeological data are still few and the imbalance with the northern regions is significant. By contrast, the historical documentation has proven plentiful: it provides evidence of both a substantial production and an undeniable know-how on the part of local craftsmen, having no apparent links to the migration of Italian glass-workers.
It was therefore essential to study this question in order to display the regional particularities as well as the ambiguities that exist between the historical sources and the reality of the archeological discoveries.
Texte intégral
Introduction
1Le XVIe siècle est souvent considéré comme le « grand siècle » pour l’art de la verrerie dans le royaume de France, qui voit notamment se développer la technique du verre émaillé. Celle-ci est déjà connue en Orient puis en Italie dès le XIIIe siècle, où sont produits des verres à décors émaillés polychromes. En France, les verres émaillés semblent provenir, à partir du XVIe siècle, d’ateliers lorrains, nivernais, languedociens — plus particulièrement à Montpellier — (Rose-Villequey 1970, 328 et 483), de Rouen (Philippe 1998, 230) et d’Ile-de-France — dans l’officine de Saint-Germain-en-Laye (Barrelet 1953, 65).
2Il est bon de rappeler ici que le procédé d’émaillage résulte « d’une technique d’ornementation pratiquée à froid et au pinceau : elle consiste à recouvrir une ou plusieurs parties d’un objet en verre déjà façonné avec des émaux vitrifiables. Le verre est ensuite recuit à une température basse d’environ 600 °C afin que les émaux s’incrustent dans le support et prennent toute leur couleur sans que la pièce ne se trouve déformée » (Cabart 2011, 34).
3Outre les verres émaillés colorés, plusieurs groupes de verres peints ont été abordés ici. Un autre type de décor, techniquement proche mais plus simple, constitué de filets blancs réapparaît également sur les verres durant le XVIe siècle. Ils sont souvent dénommés à tort « filets d’émail blanc », mais il ne s’agit pas réellement d’émail dans la mesure où l’application se fait à chaud, et non à froid, et que les verres ne sont pas repassés au feu. Ce décor, très répandu entre le IVe et le VIe siècle sous la forme de filets encerclant la partie haute de la panse (Foy, Hochulli-Gysel 1995, 161), se diffuse à nouveau durant la Renaissance. Il se renouvelle alors, sous la forme de points, tirets ou lignes sur toute la partie de l’objet. Quant aux verres « dorés », il s’agit, en l’état de nos connaissances, d’une appellation provenant uniquement de la documentation écrite du XVIe siècle.
4De nombreux verres émaillés ont déjà été étudiés par Suzanne Gaynor en 1991 et 1994 (Gaynor 1991 et 1994) et par Hubert Cabart en 2011 (Cabart 2011). Néanmoins, les verres méridionaux sont absents de ces recherches. De même, les verres à filets blancs ou « dorés » n’ont jamais fait l’objet d’une étude particulière pour cette région.
5Ce travail propose donc de dresser un premier bilan des verres décorés d’émail, de filets blancs ou « dorés » du XVIe siècle dans le sud de la France à partir des récentes découvertes archéologiques et du renouvellement de la documentation historique. Toutefois, de nombreuses interrogations seront soulevées lors de la confrontation de ces deux types de sources.
1 L’apport de l’archéologie : le mobilier issu des sites de consommation
6Grâce aux récentes études menées dans le Sud-Ouest (Hébrard-Salivas 2014) et en Languedoc (Commandré 2014), de nombreux sites verriers sont désormais connus, mais aucun ne témoigne d’artisanat du verre décoré d’émail, de filets blancs ou dorés. Il faut noter qu’il n’y a eu aucune fouille archéologique de four de verrier du XVIe siècle, seules des prospections pédestres ont été réalisées. Aucun des sites de production répertoriés par les textes n’a pu être localisé avec précision. En conséquence, le matériel présenté ici provient de sites de consommation, comme les habitats privilégiés ruraux (châteaux), ecclésiastiques ou urbains (palais, demeures bourgeoises) (fig. 1).
7Les collections des musées méridionaux ne sont pas plus riches de ce type de production. Les verres émaillés du musée Sainte-Croix à Poitiers avaient été les objets les plus méridionaux répertoriés par Suzanne Gaynor. Un verre conservé au Musée d’Aquitaine suscite des interrogations car nous ne connaissons ni sa provenance réelle ni le lieu de sa réalisation. De nombreux indices laissent à penser qu’il provient de la région Aquitaine. Il est décoré de filets et de points blancs. Le musée du petit palais d’Avignon recèle quant à lui un verre à pied tronconique, orné de nombreux filets de verre blanc opacifié (Foy, Sennequier 1989, 273), retrouvé lors des fouilles de l’hôtel de Brion. L’origine de cette gobeleterie n’a pas pu être établie avec certitude, malgré la présence d’ateliers proches dans le Luberon (Foy 1988, 122).
1.1 Les verres émaillés (fig. 2)
8Six verres à décor émaillé, parfois retrouvés dans un état très fragmentaire, ont pu être répertoriés1. Trois d’entre eux proviennent de Charente : Saint-Amant-de-Boixe (fig. 2, a), Saint-Agnant (fig. 2, b) (Sénélé 2009), Brouage (fig. 2, c). Deux éléments ont été retrouvés à Toulouse : Cité Judiciaire (fig. 2, d) (Cornardeau 2007) et Lycée Saint-Sernin (fig. 2, e). Un dernier fragment a été mis en évidence à Perpignan, au Palais des Rois de Majorque (fig. 2, f) (Mach 2014, 347).
9Il s’agit d’objets façonnés en verre incolore. Les motifs varient, mais des points communs se dégagent : les couleurs chaudes comme le rouge et le brun pour les motifs émaillés, ainsi que la présence de lignes composées de petits ronds blancs ou colorés qui encerclent la partie supérieure du contenant.
10Sur trois verres on peut lire des inscriptions de couleur blanche ou crème : « bonne fason » pour celui de Saint-Amant-de-Boixe, « SPE — SMEACHR — VS » (cela doit correspondre aux mots latins « Spes mea christus » que l’on peut traduire par « Le Christ est mon espoir ») pour celui de Saint-Agnant et la lettre « S » et peut-être « O » pour celui de Toulouse-Lycée Saint-Sernin. Des dessins sont aussi visibles : un homme habillé d’une culotte bouffante rouge tenant un bâton pour le verre de Saint-Amant-de-Boixe et deux oiseaux blancs pour celui de Saint-Agnant. Les motifs peuvent aussi se rapporter au registre végétal composé de palmettes vertes comme en témoigne le fragment de Perpignan.
11Pour les deux autres objets provenant de Brouage ou de Toulouse (Cité Judiciaire), seules des lignes horizontales de couleur marron agrémentées de points marron sont bien visibles. Quelques motifs figurés sont aussi présents, mais il est impossible d’en donner une description exacte à cause de la disparition partielle de l’émail.
12Deux de ces artéfacts, celui de Saint-Amant-de-Boixe et celui de Saint-Aignan, sont archéologiquement complets ; il s’agit de verres tronconiques à pied ourlé par refoulement de la paraison. Le fragment retrouvé à Perpignan appartient également à la base d’un verre bi-tronconique, vraisemblablement formé à partir de deux paraisons. Pour les trois autres fragments, il est délicat de déterminer la forme des objets auxquels ils appartenaient car les pieds sont manquants. Mais au regard de la forme des tessons de Brouage et de Toulouse (Cité Judiciaire), il peut s’agir de fragments de panse de verre à boire.
1.2 Les verres à décor blanc (fig. 3 à 5)
13Pour cette seconde catégorie, dont l’inventaire est sans doute loin d’être exhaustif, le nombre d’objets retrouvés est bien plus important (fig. 3 et 5). Dix-sept pièces présentent des petits traits, le plus souvent verticaux sur la panse et/ou des filets blancs sur la partie supérieure du contenant.
14Les analyses physico-chimiques des filets blancs de deux objets provenant de Saint-Génard et du château de l’Herm, montrent qu’il s’agit de verre à base de plomb et d’étain2 (fig. 4).
15Au total, on dénombre huit verres ayant des points ou des traits verticaux. Ils proviennent du musée d’Aquitaine (fig. 3a), de Saint-Cyprien (fig. 3e) (Berthon, Zélie 2010), de la Commanderie du Breuil (fig. 3f) (Pons 1996), du château de Villandraut (fig. 3b), de Toulouse du Musée Saint-Raymond (fig. 3c) et du Métro-les-Carmes (fig. 3d), d’Avignon-Hôtel de Brion (fig. 3h) ou encore de Saint-Génard (fig. 3g).
16Les décors de filets blancs qui ornent la partie supérieure du contenant sont les plus fréquents. Dix-neuf exemplaires sont recensés : cinq à Saint-Vivien (fig. 5a et b), neuf à Saint-Amant-de-Boixe (fig. 5c), un à Saint-Émilion (fig. 5d), un au château de l’Herm (fig. 5e) et trois sur le site de Pré-Putet à Yzeure (fig. 5f) (Berthon 2006).
17Les verres agrémentés d’un décor de filets blancs sont sans nul doute très fréquents et largement présents au XVIe siècle dans le Midi ; ces découvertes récentes peuvent être comparées aux ensembles plus septentrionaux de Paris (Cour Napoléon, Saint-Denis), Châlons-sur-Marne, Senlis, ou encore Orléans (Foy, Sennequier 1989, 272, 273, 277, 278, 280, 281, 287).
18On constate qu’il y a peu de matériel émaillé par rapport à celui décoré de filets blancs. Ceci est-il dû à un problème de conservation, une utilisation moins importante que dans les autres régions comme dans l’Est de la France ou tout simplement est-ce lié à un manque de savoir-faire ?
19Par le seul prisme de cette documentation archéologique ou muséographique, il serait possible d’envisager que le verre émaillé reste rare dans le Sud de la France, faisant écho à une technique peu développée dans ces régions au XVIe siècle. Or, les sources écrites en livrent un tout autre éclairage.
2 La documentation historique
20La documentation historique rassemblée ici comprend 41 actes directement liés à des objets en verre « émaillés, peints, dorés, avec décors d’animaux ». Cette documentation forme un corpus essentiellement constitué de minutes notariales établies durant le troisième quart du XVIe siècle, plus particulièrement entre 1554 et 1579. Les mentions de ces verres sont présentes dans deux grands types d’actes. La plupart sont des transactions commerciales (achat/vente de matières premières ou de produits finis, commandes), mais on relève également quelques inventaires après décès. Les données livrées par ce type de source éclairent l’artisanat du verre peint sur de nombreux points d’ordre technique, économique et sociologique3.
2.1 Les différents protagonistes
21Le commerce des verres émaillés ou pourvus d’autres décors met en relation des artisans, qui façonnent et décorent les objets, avec des marchands de Bordeaux à Toulouse. Les rares inventaires après décès contribuent pour leur part à cerner les usagers de ces productions.
2.1.1 Les artisans
22Il est parfois difficile de faire la distinction entre différentes professions à partir des termes utilisés pour les qualifier. Les transformations techniques et sémantiques ne vont pas forcément de pair. En effet, quatre groupes d’artisans du XVIe siècle travaillent l’émail ou le verre : les orfèvres, les émailleurs sur métal, les peintres-verriers qui ornent les vitraux4 et les verriers qui façonnent et parfois décorent la vaisselle en verre. Tous possèdent des fours à recuire pour parachever leur œuvre. Malgré le lien qui les unit autour de la technique et du feu, il s’agit de métiers tout à fait différents et chaque artisan bénéficie de statuts bien distincts qui organisent leur confrérie. Deux de ces professions sont pourtant proches, verriers et peintres-verriers qui travaillent sur la même matière : le verre. La distinction entre ces deux corps de métiers semble pourtant bien établie dès la fin du Moyen Âge avec la rédaction de statuts pour les peintres-verriers. En effet, ces derniers, « pintre et veyrier » faisaient partie au Moyen Âge des « imaginaires » regroupant tous les artisans représentant des histoires avec des personnages (Bayle 2005, 163). Catherine Grodecki a constaté qu’à Paris, l’appellation « peintre-verrier » avait remplacé au cours du XVIe siècle celui de « vitrier » usuellement employé jusqu’alors pour désigner ceux qui fabriquaient les vitraux (Beyssi-Cassan 2006, 120 ; Grodecki 1985). À la même époque, la ville de Toulouse délivre des statuts communs aux peintres et aux peintres verriers5. À Bordeaux, même si à notre connaissance ces derniers n’ont pas un statut particulier (Bernadet 2013), on remarque qu’ils sont plus proches des peintres et des imagiers grâce à leur « marque de besoigne » (fig. 6) qui représente soit un écusson soit un ange et non des objets en verre comme pour les verriers (Hébrard-Salivas 2009). D’autre part, les textes du XVIe siècle ne font pas toujours la distinction entre la profession de verrier (artisans produisant la matière) et celle de marchand de verres (Commandré 2014, 127). On les désigne plus simplement comme « ceux qui travaillent ou vendent le verre ». La confrérie des verriers de Montpellier se dote de statuts précoces, disparus dans un incendie, et renouvelés en 13656.
23Au total, sur la base des 41 actes rassemblés, dix artisans produisent des verres émaillés ou dorés (fig. 7). Cinq verriers provenant de quatre ateliers différents, de Gironde et du Lot-et-Garonne, produisent des coupes émaillées. Cinq autres élaborent des verres dorés dans ces deux mêmes départements et parfois dans les mêmes ateliers. Les verres émaillés comme les verres dorés peuvent être produits dans les mêmes officines, comme dans celle du Tricollet (commune de Laruscade en Gironde).
24La documentation étudiée souligne que peu de verriers semblent détenir ces techniques de décoration. Pour l’heure, aucun témoignage direct de verriers œuvrant à la fois au façonnage du verre et à son ornementation n’a pu être mis en évidence ailleurs dans le Sud de la France (Foy 1988 ; Mach 2004 ; Commandré 2014). Les liens de parenté entre les artisans qui pourraient expliquer un développement restreint de ces techniques sont ténus. La famille Robert est citée quatre fois sur les dix artisans faisant des verres émaillés dans le Sud-Ouest. Mais ici, il faut entendre le terme de « famille » au sens large, c’est-à-dire une maison dominée par une profession et non un groupe de personnes ayant de réels liens de parenté.
2.1.2 Les intermédiaires : les marchands
25Ainsi que le stipule la charte des verriers de Sommières édictée en 1445, les verriers nobles du Languedoc et des régions avoisinantes ne peuvent pas vendre directement leurs productions (Saint-Quirin 1985, 104-108). Le Traité de la noblesse de Gilles-André La Roque de la Lontière, de 1678, prévoit la même interdiction pour tous les nobles du royaume (La Roque de la Lontière 1678). Même si, à notre connaissance, une telle réglementation n’existe pas pour le Sud-Ouest, il semble que les verriers écoulent exclusivement leurs pièces de verres émaillées et dorées auprès de marchands lors de transactions concernant la vente de « salicorn ».
26Ces ventes apportent des informations précieuses car elles permettent de confirmer que des artisans qui émaillaient le verre étaient également à même de le produire. Les nombreux accords passés démontrent en effet que les marchands leur fournissaient les matières premières, comme le « salicorn » de « la pallu de Blaye » ou de Marennes, du Languedoc ou d’Espagne ainsi que des colorants. Le marchand a ainsi un rôle primordial, à la fois dans l’accès aux matières premières, et dans la commercialisation des produits verriers. En revanche, aucune trace de commande n’a pu être mise en évidence.
27Ces négociants sont déjà connus dans la région bordelaise pour les transactions avec les verriers ou avec des marchands de verres d’autres régions (Hébrard-Salivas 2014). On retrouve la famille Roy, père et fils (Jehan, Pierre et Jacques), qui a une activité importante autour du commerce du verre dans la seconde moitié du XVIe siècle (fig. 8). Malgré la présence de cette famille, on ne peut pas dire qu’il y a un monopole ou une quelconque spécialisation autour du commerce de verres émaillés ou dorés.
28Les marchands de Bordeaux achètent aussi des verres dorés à des vendeurs de Toulouse, de Tonneins et de Charente. En 1554, Jehan Roy de Bordeaux est en affaire avec Jehan Raulin de Toulouse pour des « gobeaulx dores », Guillaume Badie de Bordeaux, en 1555, avec Pierre Espervier de Tonneins pour des « verres dorez » et Pierre Bourbon de Bordeaux, en 1570, avec Jehan de la Regue de Beauzac en Saintonge pour des verres dorés. Ceci met en évidence la demande importante pour Bordeaux et peut-être une production insuffisante dans la région bordelaise. On voit ainsi que le verre émaillé est une denrée rare, qui fait l’objet de circulations interprovinciales relativement importantes (fig. 9).
2.1.3 Les consommateurs
29Dans cette chaîne commerciale, il est également intéressant de connaître les bénéficiaires de ces échanges. Or, il est difficile de dresser un inventaire représentatif des bénéficiaires de ces produits par le prisme de la seule documentation écrite, ici constituée à partir des inventaires après décès. Comme certains historiens ont déjà pu le mettre en évidence, le verre est extrêmement rare dans les testaments ou les inventaires après décès (Marandet 1998, 278)7. De fait, l’évocation de verres peints l’est plus encore.
30Les données archéologiques précédemment abordées suggéraient, par le biais des sites de consommation du verre, trois grands types d’usagers pour les verres émaillés : le clergé (et notamment les abbayes), les grandes familles royales ou seigneuriales et enfin les simples bourgeois. Parmi le corpus d’inventaires rassemblé ici, six actes seulement renseignent plus spécifiquement sur les propriétaires de verres émaillés et/ou dorés, dans la période comprise entre 1528 et 1600.
31La bourgeoisie urbaine, et plus précisément les marchands et négociants, est bien présente dans les écrits. On voit notamment que l’inventaire des biens de Miquel Compter, mercader de la ville de Perpignan, établi en 1537, énumère plusieurs verres « buffat y esmeltat8 » (soufflés et émaillés). En 1600, l’inventaire de Sauvayre Texier, marchand drapier de Montpellier, stipule que le défunt avait dans sa demeure un « bassin de verre peint »9.
32Un seul acte concerne un noble : il s’agit de l’inventaire des biens de feu Joan de Vivers, chevalier de Perpignan, dressé en 1528. Une importante quantité de verres « smeltades y deurades » (émaillés et peints) y est énumérée (22 grosses pièces), mais la nature de ces objets n’est malheureusement pas précisée.
33Enfin, trois documents du dernier tiers du XVIe siècle concernent la très haute noblesse ou les familles princières. Il s’agit de l’inventaire des biens du connétable Anne de Montmorency, dressé en 156710, celui du prince de Condé (Henri 1er de Bourbon) en 1588 (Saint-Quirin 1904, rééd. 1985, 49), et enfin celui de Catherine de Médicis en 1589 (id., ib.). Tous mentionnent la présence de verres « émaillés » ou « peintz » dont l’origine supposée est Montpellier.
34À défaut d’être représentatifs, ces documents confortent toutefois les données suggérées par l’archéologie et confèrent aux consommateurs de verres émaillés un statut plus ou moins privilégié.
2.2 Approche qualitative et quantitative de la production réalisée
2.2.1 Quels sont les objets émaillés et/ou dorés ?
35De façon générale, la documentation écrite médiévale comme moderne demeure assez indigente concernant la description des objets en verre. Souvent les tabellions passent rapidement sur ces pièces qu’ils rassemblent en groupes plus ou moins déterminés suivant leur fonction, leur valeur estimée ou encore leur origine supposée.
36Malgré tout, différents types d’objets ont pu être mis en évidence, principalement des formes ouvertes. Les écrits mentionnent la présence de coupes, de coupettes, de « gobeaux », de tasses, de bassin, de plusieurs vases et enfin de nombreux « verres » indéterminés (fig. 10).
37Les coupes sont majoritaires parmi les découvertes. Le terme de coupe est sans doute générique et ne représente pas forcément les formes basses et largement ouvertes que nous connaissons actuellement, mais peut-être des verres à boire équipés d’une large coupe. Il pourrait s’agir notamment des verres à pied conique ou tronconique, très souvent représentés sur les marques de besognes des artisans. Il en est de même pour les « coupettes ».
38Les « gobeaux » doivent être des gobelets et certainement des verres à pied tronconique qui appartiennent à une forme très répandue en France et dans le Sud-Ouest (Hébrard-Salivas 2014, 307).
39Le terme de « tasse » renvoie quant à lui probablement à un récipient de petite contenance, destiné à boire, pouvant être équipé d’un pied et d’une ou deux anses. L’unique mention de « bassin » relevé dans un inventaire après décès semble être un objet plus grand, peut-être destiné à la toilette. Restent enfin les termes génériques de « vases » ou de « verres » qui n’autorisent aucune hypothèse d’interprétation, pas même celle d’envisager s’il s’agit de formes ouvertes ou fermées.
2.2.2 Le prix des objets et les quantités produites
40Les verres sont vendus essentiellement par « grosses » (il s’agit d’une douzaine d’objets). Qu’ils soient émaillés ou dorés, les prix fixés pour ces pièces semblent identiques et rejoignent la catégorie des verres luxueux dits « façon de Venise » (Hébrard-Salivas 2014, 416). De même, les transactions commerciales indiquent des prix relativement stables durant le troisième quart du XVIe siècle, malgré l’inflation constante relevée par les historiens à cette époque (Leroy-Ladurie 1991, 59). En moyenne, le prix d’un objet en verre émaillé ou doré s’élève approximativement à 4 sols l’unité (fig. 11). Une transaction se démarque toutefois largement de cette moyenne ; il s’agit de la vente des productions de Pierre Robert qui, en 1572, parvient à les écouler pour un montant de 8 sols l’unité. Sans doute faut-il y voir le temps, le soin et la qualité particulière apportés à ces ouvrages, ornés « danimaulx anes ».
41À titre de comparaison, le verre ordinaire se vend à la même époque entre 12 et 15 sols la grosse, cela correspond de 1 à 2 sols l’objet (Hébrard-Salivas 2014, 417). Le verre émaillé ou doré coûte donc environ trois fois plus cher qu’une production commune, dite de « verre blanc ».
42Quant aux quantités produites, il est difficile d’en évaluer l’importance car c’est souvent le prix des objets ou des grosses qui est indiqué sur les actes et non le nombre de produits vendus. Certains actes l’indiquent : il est parfois question de vente de douze coupes émaillées11 d’autres de quatre cents coupes émaillées12. Il en est de même pour les verres dorés qui sont vendus de dix grosses13 à trente et une grosses14 (soit trois cent soixante-douze objets).
43Les descriptions des objets à partir de nos sources écrites sont limitées. Nous avons des verres émaillés, des verres dorés et des verres à décor historiés d’animaux (ânes, « lyons serfs et aultres beste »)15. Au final, les archives notariales livrent une certaine répartition des traitements de surface où semblent dominer les verres dorés. Les verres émaillés arrivent en seconde position (fig. 12).
44Deux transactions font référence à l’achat de colorants. Pierre Robert de la verrerie de Saint-Symphorien achète le 30 octobre 1564, à Guillaume Badie, de la « couleur a faire verre »16. Il en est de même le 15 janvier 1557, quand Jehan Juilhot de la verrerie de la Font de Chausse en Périgord achète au même commerçant de la « coulleur de la peyrousse »17.
45Malheureusement aucun texte ne permet d’aborder avec précision les matières premières nécessaires à ces diverses ornementations. Aussi, est-il difficile d’envisager les matériaux utilisés pour la dorure : s’agissait-il véritablement d’un alliage aurifère ? Quoi qu’il en soit, aucun achat d’or n’est mentionné dans notre documentation écrite.
46Quant aux pigments utilisés pour l’émaillage, Haudicquer de Blancourt précisait en 1697 que « la plupart des matières qui servent à peindre le verre nous servent aussi à les teindre en couleurs » (Haudicquer de Blancourt 1697, 444).
47On remarque aussi que le travail réalisé par les émailleurs sur métal de Limoges était proche de celui des verriers pour émailler les verres (Molinier 1891, 255). Le blanc obtenu grâce à l’oxyde d’étain était la seule couleur opaque utilisée au XVIe siècle par les émailleurs de Limoges. En 1583, Dominique Mouret, orfèvre limousin, donne une recette de cet « émail blanc », « Mémoire pour faire l’émail blanc : prenez une livre de verre blanc bien pillé et un quart de livre de carsine qui est de l’étain brûlé et mis en poudre et le passer bien fin et le mêler avec ledit verre et faites fondre le tout ensemble et fera beau » (Beyssi-Cassan 2006, 153). Les autres émaux étaient des émaux translucides utilisés depuis les années 1530 : il s’agit de verres transparents auxquels étaient ajoutés des oxydes métalliques pour les colorer soit en bleu, soit en jaune, ou en vert, en violet ou en rouge. Les émaux opaques se diluent à l’huile, les émaux translucides nécessitent exclusivement de l’eau. Les manuscrits des anciens émailleurs donnent des conseils à propos du travail de l’émail : « casser les couleurs dans un mortier, bien net les broyer et qu’elles soient bien lavées avec de l’eau bien vite ». Les émaux étaient conservés dans des petits pots fermés et « regarder qu’il ne tombe pas de terre dedans ni de poussières, tenir bien couvert » (Beyssi-Cassan 2006, 156).
48Est-ce que les techniques utilisées par les verriers et les émailleurs étaient les mêmes ? Les écrits ne nous éclairent pas sur les techniques employées. Le seul élément qu’il est possible d’établir est le regroupement des activités dans un même atelier : les verres étaient soufflés, puis décorés sur place. Par ailleurs, il n’y avait pas de spécialistes du dessin, exception faite des deux verriers qui font des motifs d’animaux : Pierre Robert de l’atelier de Saint-Symphorien et Bastien Besse dans l’atelier du Tricollet.
3 Confrontation des sources
49Plusieurs déséquilibres ou inadéquations peuvent être mis en avant en confrontant les sources écrites aux sources archéologiques ou même en confrontant les sources écrites entre elles. Pour autant, l’approche interdisciplinaire reste essentielle et permet de dresser une première trame de cet aspect si particulier de l’artisanat verrier du XVIe siècle.
3.1 Déséquilibre quantitatif des sources
50Tout d’abord, on remarque un large déséquilibre entre les données historiques et archéologiques. Très peu de mobilier a été mis au jour par rapport aux informations apportées par les textes. En effet, il est parfois question de livraison de cent coupes, voire quatre cents coupes émaillées. Or, nous n’avons recueilli que cinq objets différents. Quant aux verres dorés, aucun exemplaire ne nous est connu. On sait que le verre est un matériau fragile faisant l’objet d’un recyclage permanent, et son étude dans le cadre des fouilles préventives comme programmées a longtemps été reléguée, faute de moyens mais aussi de spécialistes.
51De même, le potentiel archéologique du Sud de la France est encore loin d’avoir été exploité dans sa globalité. Faudrait-il expliquer cette carence locale en envisageant que les productions des artisans méridionaux constituaient des produits luxueux, destinés à une clientèle élitaire et à un marché bien plus lointain, étendu au Royaume ? À ce stade de l’étude, l’hypothèse paraît toutefois peu probable, eu égard aux tarifs relativement modérés mentionnés dans les transactions commerciales, ainsi qu’aux quelques mentions de verres émaillés retrouvées malgré tout dans les inventaires après décès. Les transactions commerciales montrent toutefois que ce type de produit peut connaître une aire de diffusion sur plusieurs centaines de kilomètres.
3.2 Déséquilibre géographique des données et inadéquation de la terminologie
52D’autres disparités se font jour, notamment entre les centres de fabrication de verres émaillés connus par les textes et la localisation des découvertes archéologiques.
53À titre d’exemple, les verres à décor de filets blancs sont très présents dans le Sud-Ouest. Il n’en est pourtant jamais question dans les sources écrites qui n’abordent que les verres émaillés, dorés et « écrits » (fig. 1). On peut citer ainsi Gabriel Robert de la verrerie de Castel Mouron qui vend à Jehan Roy en 1556 « … dix grosses de verres escrits… »18. Émile Dusolier pense que les « verres escrits » étaient des verres gravés (Dusolier 1940, 443). Mais rien ne permet de l’affirmer puisqu’aucun verre gravé n’a été mis au jour dans la région sur les 23 sites archéologiques étudiés de cette période (Hébrard-Salivas 2014, 34) et de plus, aucune source historique ne permet de le confirmer. Peut-il alors s’agir de verres portant une inscription en émail ?
54Il faut donc s’interroger sur la terminologie et le choix sémantique des notaires de cette période. Que désignent réellement les termes de « verre émaillé », « verres dorés » ou « verres escrits » au XVIe siècle ? Ces appellations recouvrent-elles la représentation que nous en avons actuellement ?
55Serait-il possible que les verres du XVIe siècle dits « émaillés » englobent aussi les verres à filets blancs ? Aucune description de ces derniers n’apparaît dans les minutes notariales, il n’est jamais question de verres décorés de filets blancs. Les tabellions ou les artisans du XVIe siècle avaient-ils la notion d’une technicité différente entre ce que nous appelons actuellement émail et verre blanc opaque ? Pour leur part, les émailleurs limousins utilisaient les termes d’« émail blanc », comme Dominique Mouret en 1583 (Beyssi-Cassan 2006, 153). De même, le dictionnaire de l’émailleur Aimar de Ranconner, paru en 1606, stipule qu’« émailler » peut avoir la signification d’« orner » (Aimar de Ranconner 1606). Ainsi se pose le problème d’un vocabulaire générique plus ou moins interchangeable.
56Quant aux verres « dorés » découverts dans les registres notariaux, aucune trace de ce type d’objet n’est présente dans les découvertes archéologiques. Est-ce qu’ils étaient tous destinés à l’exportation ? Il se peut que, sur les artéfacts exhumés, la dorure ait totalement disparu au fil du temps et qu’il ne reste actuellement que des verres incolores. Pourtant, on sait qu’au XVIe siècle la distinction était faite entre verres émaillés et verres dorés, grâce à une minute de 1563 où il est question d’une vente réalisée au profit de Pierre Boyleau : la première partie de l’accord concerne des verres émaillés et des verres dorés dans la seconde partie. La distinction est bien établie entre les deux types d’ornementation19.
3.3 Les verriers italiens seuls détenteurs du savoir-faire ?
57Des spécialistes du verre en France s’accordant à penser que les productions françaises de verres émaillés au XVIe siècle étaient essentiellement liées aux migrations des verriers italiens. À titre d’exemple, le verrier Fabiano Salviati établi dans le Poitou vers 1572 semble être l’unique artisan des verres émaillés découverts dans cette région (Gaynor 1991, 73)20. De même, lorsqu’un verrier italien obtient un privilège pour fabriquer des ouvrages en verre, on lui attribue souvent d’office cette capacité à faire des verres émaillés (Barrelet 1953, 78).
58Or, notre documentation écrite montre clairement que des verriers aquitains produisent des « coupes émaillées » à partir de 1556 et qu’ils ne sont pas d’origine italienne, comme Constantin Jehan et Robert François. Plus encore, l’installation d’ouvriers italiens dans le Sud-Ouest ne semble effective qu’à partir des années 1569 avec le verrier Pierre Diffranx, et à notre connaissance, il ne produit pas de verres émaillés, il est juste qualifié de « verrier Ytalyen » installé dans la paroisse Sainte-Croix à Bordeaux21.
59Il est dès lors permis de s’interroger sur l’origine et la transmission de ces techniques dans la région. Comment et à quelle époque ces savoir-faire ont-ils pu être transmis aux verriers méridionaux ? D’après nos sources écrites, cette transmission semble s’effectuer au plus tard dans la première moitié du XVIe siècle.
Conclusion
60Si les interrogations demeurent encore nombreuses et la documentation, écrite comme archéologique, encore largement en devenir, de nouvelles données sur les verres du XVIe siècle décorés d’émail, de dorure ou de filets blancs peuvent désormais être mises en évidence pour le Sud de la France. Malgré la proximité des centres italiens et catalans et les migrations d’artisans, la diffusion de ces techniques d’ornementation ne paraît pas plus précoce dans le Midi que dans les zones plus septentrionales de la France et elle semble se développer à partir du milieu du XVIe siècle. Les textes montrent une période de production dense durant le troisième tiers du XVIe siècle et soulignent le rôle prépondérant de verriers locaux, issus de quelques grandes familles ayant essaimé sur de vastes territoires.
61Autre particularité, les centres de productions du Sud-Ouest sont étroitement associés au monde rural. L’ensemble de la chaîne opératoire, depuis la production du verre jusqu’à l’ornementation des pièces, paraît être assurée dans l’atelier par une équipe d’ouvriers plus ou moins polyvalents de l’atelier. Mais d’autres organisations sont également envisageables et la question d’une division du travail se pose en Languedoc, avec d’une part les ateliers forestiers produisant les objets et d’autre part un travail d’émaillerie effectué par d’autres artisans en ville.
62Le caractère rare de ces types de décors au Sud de la France, dans la documentation archéologique comme dans les écrits, amène à s’interroger : la verrerie émaillée serait-elle issue d’une tradition plus septentrionale ? Existe-t-il une production « de caractère populaire » dans le Midi, à l’instar de ce que Hubert Cabart avait mis en évidence dans l’Est de la France à la même période (Cabart 2011, 265) ?
63Il s’agit là d’un simple état de la question visant à dresser un premier bilan des verres décorés d’émail, de dorure ou de filets blancs dans le Sud de la France. Malgré la richesse des documents écrits, cette recherche demeure partielle et invite à approfondir le sujet.
Figures
Fig. 4 - Analyses physico-chimiques des filets de verre blanc (B. Gratuze, CNRS Orléans).
Références objet | Na2 O | Mg O | Al2 O3 | Si O2 | K2 O | Ca O | Mn O | Fe2 O3 | Co O | Cu O | Zn O | Sn O2 | Pb O |
Château de l’Herm (fig. 5, e) | 8,93% | 0,66% | 0,85% | 38,25% | 1,08% | 2,75% | 0,142% | 0,39% | 0,002% | 0,011% | 0,010% | 22,985% | 22,058% |
Saint-Génard (fig. 3, g) | 10,46% | 1,01% | 2,40% | 43,32% | 2,04% | 1,89% | 0,307% | 0,50% | 0,002% | 0,009% | 0,019% | 13,725% | 22,164% |
Fig. 7 - Tableau des artisans verriers produisant des verres émaillés et/ou dorés (1556-1579).
Nom du verrier | Nom de l’atelier et de la région | Type de production | Dates |
Constantin Jehan | Ruffiac en Agenais | Verres émaillés | 1556 |
Robert François | Font-Rouge en Bazadais | Verres émaillés | 1556 |
Grenier Guilhem | Serdiauxs en Agenais | Verres émaillés | 1561 |
Colomb Anthoine | Tricollet en Cubzagais | Verres émaillés | 1566 |
Robert Jacques | Tricollet en Cubzagais | Verres émaillés | 1567 |
De la Cau Jehan | Antagnac en Bazadais | Verres dorés | 1556 à 1571 |
Robert Gabriel | Castelmouron | Verres dorés | 1556 |
Legret Mathieu | Domezac | Verres dorés | 1567 |
Robert Pierre | Saint-Symphorien | Verres dorés | 1574 |
Besse Bastien | Tricollet en Cubzadais | Verres dorés | 1579 |
Fig. 8 - Tableau des marchands commercialisant des verres émaillés et/ou dorés (1554-1579).
Noms des marchands | Villes d’origine | Types de produits achetés | Dates |
Roy Jehan | Bordeaux | « gobeaultx dores » « Couppes esmaillées » « couppes esmaillées facon de venise » Verres dorés | 1554 1556 1561 1556 |
Boileau Pierre | Bordeaux | Coupes émaillées « Coupes esmaillées tant petites que grandes » | 1556 1567 |
Gacherie Anthoine | Bordeaux | Coupes émaillées | 1566 |
Roy Pierre | Bordeaux | Coupes émaillées | 1567 |
Badie Guillaume | Bordeaux | Verres dorés | 1555-1556 |
Podenssen Pierre | Bordeaux | Verres dorés | 1566 |
Bourbon Pierre | Bordeaux | Verres dorés Verres dorés Verres décorés « danimaulx anes » « gobaultz dore » « Verres dorés fais en lyons serfs et austres bestes » | 1567 1571 1572 1574 1579 |
Roy Jacques | Bordeaux | « verres dorés blancs façon de venise » | 1560 |
De Louperic Bertrand | Bordeaux | Verres dorés | 1556 |
Raulin Jehan | Toulouse | « gobeaultx dores » | 1554 |
Espervier Pierre | Tonneins | Verres dorés | 1555 |
De la Regue Jehan | Beauzac | Verres dorés | 1570 |
Fig. 11 - Quelques exemples de prix de verres émaillés et/ou dorés (1556-1574).
Type d’objets | Quantités produites/échangées | Prix à l’unité | Nom du verrier ou de l’acheteur | Années/références (ADG : Archives départementales de Gironde) |
Coupes émaillées | 53 livres, 175 coupes | 4 sols tournois | Constantin Jehan | 1556-ADG 3E 2408 f°307 |
Coupes émaillées | Coupes émaillées et « gobault » à 13 sols t. la grosse | 1 sol 1 denier | Robert François | 1556-ADG 3E 2408 f°913 |
Verres dorés | Verres dorés à 40 sols la grosse | 3 sols et 4 deniers | Robert Gabriel | 1556-ADG 3E 2408 f°1627 |
Coupes émaillées « façon de Venise » | 100 coupes contre « salicorn » pour un montant de 20 livres tournois | 4 sols | Grenier Guilhem | 1561-ADG 3E 2414 f°579 |
Coupes émaillées | 12 coupes « tant petites que grandes » | ? | Robert Jacques | 1567-ADG 3E 4796 f°343 |
Verres dorés | 8 grosses pour 20 livres tournois | 4 sols 2 deniers | Legret Mathieu | 1567-ADG 3E 4796 f°340 |
Verres dorés | - verres dorés assortis « couppes gobeaulx et autltres » pour 50 sols la grosse - verres dorés à 50 sols t. la grosse - verres dorés à 54 sols t. la grosse | 4 sols 2 deniers 4 sols 2 deniers 4 sols 6 deniers | De La Cau Jehan | 1556 -ADG 3E 2408 f°1740 1566-ADG 3E 4791 f°320 1571-ADG 3E 4797 f°424 |
Verres dorés | 100 verres dorés à 19 sols la grosse | 1 sols 7 deniers | Masse Jehan | 1571-ADG 3E 4797 f°295 |
« danimaulx anes » | 4 grosses «deux pour douzaine» à 16 sols la grosse = 8 objets | 8 sols | Robert Pierre | 1572-ADG 3E 4798 f°217 |
« Gobaultz » dorés | 1 grosse et 1/2 | ? | Robert Pierre | 1574-ADG 3E 4799 f°66 |
Coupettes dorées Verres dorés | - verres blancs dorés à 50 sols la grosse - 2 grosses de coupettes, 2 grosses verres dorés « faits de lyons serfs et aultres bestes » à 1 écu la grosse | 4 sols 2 deniers 5 sols | Besse Bastien | 1567-ADG 3E 4796 f°208 1579-ADG 3E 4800 f°452 |
« Gobeaulx » dorés | 31 objets | 5 sols t. | Roy Jehan | 1554- ADG 3E 2406 f451 |
Verres dorés | Verres dorés à 40 sols la grosse | 3 sols et 4 deniers | Pierre Espervier | 1555-ADG 3E 2407 f°1323 |
Verres dorés | Verres dorés à 40 sols la grosse | 3 sols et 4 deniers | De Loupéric | 1556-ADG 3E 2408 f°441 |
Verres dorés « blancs façon de venize » | Achat pour un montant de 300 livres tournois | ? | Roy Jacques | 1560-ADG 3E 2413 f°918 |
Verres dorés Coupes émaillées | 9 grosses et ½ de verres dorés à 48 sols tournois la grosse ? | 4 sols ? | Pierre Boyleau | 1563-ADG 3E 4788 f°311 |
Verres dorés | 10 grosses à 54 sols la grosse | 4 sols et 6 deniers | Bourbon Pierre | 1570-ADG 3E 4797 f°236 |
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Tous nos remerciements à nos collègues ayant bien voulu nous transmettre ces données, pour certaines encore inédites : A. Bertin, S. Cornardeau, J. Mach.
2 Tous nos remerciements à Bernard Gratuze du Laboratoire Iramat/université d’Orléans, Institut de Recherche sur les archéomatériaux, Centre Ernest Babelon, UMR 5060 CNRS, pour la réalisation de ces analyses.
3 Tous nos remerciements à D. Fontaine et à J. Mach pour la documentation transmise pour le Roussillon.
4 Ce groupe est un terme générique qui englobe également les vitriers. Ces derniers ne se démarquent clairement dans les écrits qu’à partir du XVIIe siècle en Aquitaine avec le développement de l’usage du verre plat.
5 D’après les recherches menées par J. Bayle, ces premiers statuts ont été perdus et sont renouvelés en 1506.
6 Arch. Mun. Montpellier, BB 193, Année 1365, pièce n° 14. Ces statuts règlementent notamment la possibilité de lever un laboratoire au sein de l’agglomération.
7 Marandet 1998, p. 278. L’auteur suppose que les objets ont été légués, volés ou vendus avant le passage du notaire.
8 Arch. Dép. Pyrénées-Orientales, 3 E 1/5451, Joan Port, notaire de Perpignan, liasse, 1537-1539.
9 Arch. Dép. Hérault, 2 E 61/126, inventaire non folioté.
10 Archives anciennes du château de Chantilly : séries 1A-001 et 1A-002.
11 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 4796 f°343, notaire Jehan Dubois.
12 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 4796 f°148, notaire Jehan Dubois.
13 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 2408 f°1627 (verso), notaire Raoul Brigot.
14 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 2406 f°451, notaire Raoul Brigot.
15 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 4800 f°263 (verso), notaire Jehan Dubois.
16 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 2417 f°701, notaire Raoul Brigot.
17 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 2410 f°429 (verso), notaire Raoul Brigot.
18 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 2408 f°11627 (verso), notaire Raoul Brigot.
19 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 4788 f°311.
20 Gaynor 1991, 73 : cet auteur avance le fait que Fabiano Salviati s’est installé dans le Poitou en 1560 sans en donner les références alors que James Barrelet date en 1572 l’installation de cette famille dans la région, lui aussi sans en donner les références.
21 Arch. Dép. de Gironde, 3 E 2422 f°572.
Auteurs
Docteur en archéologie médiévale Ausonius, UMR 5607, CNRS, Université Bordeaux Montaigne.
Inrap-Méditerranée, CNRS-UMR 5140, Laboratoire de Sociétés Méditerranéennes.
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