Camp de Septfonds
Le Camp de Septfonds, appelé Camp de Judes, est un camp français pour réfugiés, internés ou prisonniers, ouvert en et fermé en , situé dans la commune de Septfonds (Tarn-et-Garonne), à environ 5 km au nord-est de Caussade.
Camp d'internement de Septfonds | ||
Vue du camp | ||
Présentation | ||
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Type | Camp de concentration | |
Gestion | ||
Date de création | Février 1939 | |
Date de fermeture | Mai 1945 | |
Victimes | ||
Géographie | ||
Pays | France | |
Région | Midi-Pyrénées | |
Localité | Septfonds (Tarn-et-Garonne) | |
Coordonnées | 44° 10′ 49″ nord, 1° 37′ 11″ est | |
Géolocalisation sur la carte : France
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Histoire du camp de Septfonds
modifierFévrier 1939 – mars 1940
modifierCentre d’hébergement de réfugiés espagnols
Le gouvernement Daladier, pressé de décongestionner les camps de réfugiés espagnols des Pyrénées-Orientales, choisit le Tarn-et-Garonne pour implanter l’un des cinq nouveaux camps destinés à l’hébergement de 15 000 personnes.
Les autorités civiles et militaires du département arrêtent le choix définitif d’un vaste terrain situé à Lalande et à Judes, commune de Septfonds, à un kilomètre du village. Soucieuses de rassurer les populations locales les autorités affectent plus d’un millier de gardes-mobiles, de fantassins, de dragons et de tirailleurs sénégalais à la surveillance du camp, et abandonnent le projet initial d’arrivée d’Espagnols en gare de Caussade, qui impliquait la traversée de la ville entière et du village de Septfonds. La petite gare de Borredon, d’où le trajet peut s’effectuer en rase campagne est finalement retenue.
5-12 mars 1939
modifier2 500 « miliciens espagnols » sont déversés quotidiennement sur le quai de la gare de Borredon, puis conduits sur le site de Septfonds encore en cours d’aménagement. Les autorités militaires décident alors l’ouverture d’un camp provisoire à Lalande, où les Espagnols sont hébergés avant d’être envoyés au camp définitif de Judes au fur et à mesure de l’achèvement des baraques. Ce camp est alors appelé "camp de concentration" par les autorités de l'époque.
20 mars 1939
modifierLe transfert des Républicains espagnols au camp de Judes est achevé. 16 000 Espagnols sont désormais internés à Septfonds.
Le grand ennemi à vaincre derrière les barbelés est l’ennui, mais les réfugiés s’organisent : une troupe de théâtre est montée par un acteur professionnel, un orchestre amateur, un atelier de peinture mis en place. La vie politique se réorganise elle aussi : des cellules et des comités regroupant les militants du Parti communiste espagnol sont créés. Des groupes de travailleurs sont aussi rassemblés par l’armée qui les utilise pour l’entretien du camp et pour exécuter des travaux de terrassement sur le camp militaire de Caylus. Conscient de l’énorme réservoir de main d’œuvre que représentent les réfugiés, le gouvernement offre la possibilité aux internés de quitter le camp en signant un contrat de travail. Des centaines d’Espagnols sont ainsi embauchés comme ouvriers agricoles dans tout le département. D’autres, sélectionnés pour leurs qualifications, sont transférés dans des camps spéciaux et recrutés dans l’industrie.
Février – mars 1940
modifierLa population espagnole est progressivement évacuée du camp. Selon leurs aptitudes professionnelles, leur santé et leur comportement, les réfugiés sont versés dans les autres camps du sud-ouest. Le , 4 compagnies de travailleurs étrangers sont également constituées. Seules les 220e et 221e compagnies, affectées à l’entretien du camp, sont maintenues à Septfonds.
15 mars 1940
modifierLe camp de Septfonds devient Centre de mobilisation pour les étrangers désireux de s’engager dans les « régiments de marche de volontaires étrangers ». Une partie du camp est mise à la disposition de l’armée polonaise en France, qui y instruisit environ 800 hommes relevant de l’armée de l’air (ensuite transférés à Lyon-Bron).
Centre de triage et d’hébergement des étrangers en surnombre
Été – automne 1940
modifierÀ la suite de la signature de l’armistice franco-allemand, les autorités militaires utilisent le camp de Septfonds comme centre de démobilisation pour les engagés volontaires étrangers. Le Ministre du Travail du Gouvernement de Vichy y constitue quant à lui des groupements de travailleurs étrangers, dont le 302e groupement composé de Juifs.
2 janvier 1941
modifierCréation d’un camp de triage et d’hébergement, relevant du Ministère de l’Intérieur, sur la parcelle cédée par le Ministère de la Guerre. Cet enclos, contenant six baraquements et isolé par une clôture barbelée, est désormais destiné aux « étrangers en surnombre dans l’économie départementale ». Le gouvernement de Vichy crée « un centre spécial destiné aux officiers des armées ex-alliées ayant tenté de quitter la France clandestinement » : des militaires belges et polonais, arrêtés et jugés, sont retenus à Septfonds, d’avril à juillet 1941.
28 mai 1941
modifierDésaffectation officielle du camp de triage : les internés devront être transférés dans les camps des Pyrénées-Orientales et de Haute-Garonne. Maintien d’un îlot de sûreté pour les « étrangers suspects » du département.
Eté 1942 – 1944
modifierCentre de rassemblement pour individus dangereux
Février – juin 1942
modifierMaintenu par le Préfet de Tarn-et-Garonne, le camp réservé aux étrangers en surnombre accueille maintenant une centaine d’internés. Le , en raison des multiples conflits et en vue de « l’incorporation prochaine d’Israélites en nombre important » dans le 302e G.T.E., Vichy transfère le camp de triage dans une zone isolée au sud de l’enceinte de Judes, pour finalement le fermer définitivement le 1er juillet.
Juillet 1942
modifierEn application du plan gouvernemental de maintien de l’ordre, un « centre de rassemblement pour individus dangereux » est créé en lieu et place du camp de triage.
24 août 1942
modifierQuatre-vingt-quatre internés juifs appartenant à la 302e Compagnie de Travailleurs Étrangers sont conduits en gare de Caussade, parqués dans un même wagon, à destination d’Auschwitz via Drancy.
26 août 1942
modifierDeux cent onze juifs étrangers (hommes, femmes, enfants) raflés par la police et la gendarmerie françaises en Tarn-et-Garonne et pour trente-neuf d’entre eux dans le Lot, sont conduits par camion au Centre de Rassemblement de Septfonds.
Nuit du 2 au 3 septembre 1942
modifierLes 211 internés sont acheminés en gare de Caussade et intégrés à un important convoi régional qui rejoint Drancy le , pour arriver a Auschwitz cinq jours plus tard. Au total, 295 personnes sont déportées depuis le camp de Septfonds vers l’enfer concentrationnaire nazi.
1943-1944
modifierLe 302e Groupe de Travailleurs Étrangers subsiste au camp jusqu’à la Libération. En mars 1943, il ne compte plus que 70 Israélites à la suite d’un « prélèvement » effectué par les autorités allemandes. Les internés, soumis à une discipline militaire sont employés à des travaux de terrassement, de culture et d’entretien du camp.
À partir de septembre 1943, il est utilisé comme « Centre d'Accueil » pour femmes juives « sans ressource et sans emploi »[1].
Baptisé « Centre de séjour surveillé », le camp de Septfonds sera utilisé par le gouvernement de la république rétablie, une dernière fois, après la libération, pour la détention de 500 hommes et femmes accusés de collaboration avec l'ennemi et d'activités anti-nationales[1].
1945
modifierLe camp est définitivement fermé en mai 1945 : le camp est démantelé et les documents administratifs sont incinérés le [1].
Controverse
modifierEn décembre 2018, le préfet du Tarn-et-Garonne Pierre Besnard autorise un projet d’extension d’une porcherie (6 500 porcs charcutiers annuels[2]) à l’entrée du camp de Judes. Dès l’accord de la municipalité de Septfonds en 2017, une mobilisation s’organise pour lutter contre ce projet qui, outre ne pas respecter le bien-être animal, constitue une atteinte à la dignité des lieux. Marie Piqué, élue du Lot et conseillère régionale, fille de républicains espagnols, explique : « Aucun intérêt privé quelle que soit sa nature ne doit effacer notre histoire[3] ! » Tandis que des habitants de Septfonds font signer une pétition contre ce projet[4], ils reçoivent des menaces directes du président départemental de la FNSEA et président de la chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne, Jean-Paul Rivière[5].
Notes et références
modifier- Texte extrait des panneaux historiques réalisés par le Musée de la Résistance de Montauban (1997).
- « Septfonds : « Non à l'extension d'un élevage de porcs près d'un lieu de mémoire » », sur France 3 Occitanie (consulté le )
- www.occitanie-tribune.com, « Tarn et garonne - TARN et GARONNE - Projet d'extension d'une porcherie sur le camps (sic) de concentration de Septfonds », sur Occitanie-Tribune, (consulté le )
- « L'agrandissement d'une porcherie sur un ancien camp de réfugiés fait débat », sur RTL.fr (consulté le )
- « Un projet d'élevage intensif à l'entrée d'un ancien camp de concentration soulève l'indignation », sur Reporterre, le quotidien de l'écologie (consulté le )
Bibliographie
modifier- Geneviève Dreyfus-Armand, Septfonds, 1939-1944. Dans l'archipel des camps français, Perpignan, Le Revenant, 2019.
Article connexe
modifier- Isaac Kitrosser (1899-1984) : photojouraliste, ingénieur chimiste et résistant arrêté par la Gestapo et interné au camp de Septfonds.
Liens externes
modifier- Le camp de Septfonds : 60 ans d’histoire et de mémoire, in revue Arkheia, Montauban, no 5-6, 2002.
- opposition au projet d'extension de porcherie aux abords du site du camp de concentration
- «Le camp de Septfonds», Musée français de la photographie, Histoires de photographies [1]
- «Cérémonie juive dans le camp de Septfonds», Musée français de la photographie, Histoires de photographies [2]