Ai Weiwei
Ai Weiwei (chinois : 艾未未 ; pinyin : ), né le à Pékin est à la fois sculpteur, photographe, voyageur, architecte, commissaire d'exposition, blogueur chinois et militant.
Naissance | |
---|---|
Nom dans la langue maternelle |
艾未未 |
Nationalité | |
Formation |
Académie de cinéma de Pékin (à partir de ) Université de Pennsylvanie (à partir de ) Université de Californie à Berkeley (à partir de ) Parsons The New School for Design (- Art Students League of New York (- |
Activité | |
Père | |
Conjoint |
Lu Qing (en) |
Membre de | |
---|---|
Mouvement | |
Représenté par |
Lisson Gallery, Mary Boone Gallery (d) |
Genres artistiques |
Sculpture, installation, installation (en), social-artistic project (d) |
Influencé par | |
Site web |
(en) www.aiweiwei.com |
Distinctions | Liste détaillée The Glass of Reason () Prix Václav-Havel () Prix Ambassadeur de la conscience () LennonOno Grant for Peace (en) () |
Il est le fils du poète et intellectuel Ai Qing (1910-1996), et demi-frère du peintre Ai Xuan. Il est marié à l'artiste Lu Qing. Il a un fils, Ai Lao.
Ai Weiwei est un artiste majeur de la scène artistique indépendante chinoise. Il est connu internationalement pour son art et ses performances artistiques provocantes et politiques[2]. Il est la figure de l'opposition au pouvoir et l'emblème de la liberté d'expression en Chine. Il est l’un des 303 intellectuels chinois à avoir signé la Charte 08[3], et a ouvertement critiquer la position du gouvernement chinois sur la démocratie et les droits de l'homme. En tant qu’architecte, il a été conseiller artistique pour le cabinet d'architecture suisse Herzog & de Meuron lors de la réalisation du stade national de Pékin construit pour les Jeux olympiques d'été de 2008[4].
Il a été arrêté par la police en , officiellement pour évasion fiscale, et libéré sous caution 81 jours plus tard. Dès lors, il reste en liberté conditionnelle mais ne peut pas quitter Pékin sans autorisation. Après avoir récupéré son passeport chinois le , il quitte la Chine pour s'installer avec sa famille à Berlin, en Allemagne[5], puis en 2019, à Cambridge, au Royaume-Uni[6]. Depuis fin 2019, il vit à Montemor-o-Novo, ville portugaise située dans le district d'Évora, région de l'Alentejo.
Biographie
modifierPremières années
modifierNé à Pékin, le , Ai Weiwei passe les premières années de son enfance et de son adolescence dans les conditions de vie difficiles imposée à sa famille par la révolution culturelle. Son père est le poète et intellectuel Ai Qing, qui fut qualifié de « droitiste » lors de la campagne des Cent Fleurs après certaines remarques critiques vis-à-vis du régime[7]. Il est envoyé, en 1958, avec sa femme Gao Ying et ses enfants dans un camp de travail et de rééducation, tout d'abord dans une ferme forestière de Beidahuang dans la province de Heilongjiang, à l'extrême Nord-Est du pays. Deux ans plus tard, en 1960, la famille est envoyée dans le Nord-Ouest de la Chine, au milieu du désert de Gobi, à Shihezi, dans la province du Xinjiang. Weiwei y vit jusqu'à l'âge de 17 ans, tandis que son père subit toutes les humiliations publiques possibles, dans sa rééducation politique en pleine révolution culturelle[8].
La vie étudiante à Pékin
modifierEn 1976, la famille peut rejoindre le Printemps de Pékin[9]. En 1978, il est accepté à l'université de cinéma de Pékin, où il étudie avec Chen Kaige et Zhang Yimou[10]. Il participe au mur de la Démocratie du quartier de Xidan, vers décembre 1978, et la condamnation de son animateur Wei Jingsheng à 15 ans de prison, dégoûte littéralement Ai Weiwei de la politique et de la justice.
En 1979, il fonde avec d'autres (Huang Rui, Ma Desheng, Li Shuang, Wang Keping, Zhong Acheng…) le groupe d'avant-garde « Les Étoiles »[11]. Ses œuvres seront incluses dans les expositions anniversaires des Étoiles : « The Stars: Ten Years, 1989 » (Hanart Gallery, Hong Kong et Taipei) et l'exposition rétrospective au Today Art Museum de Pékin « Origin Point, 2007 ».
New York (1981-1993)
modifierDès 1981, grâce à un réseau de relations, il part aux États-Unis, principalement à New York, où il est étudiant à la Parsons The New School for Design, qu'il délaisse rapidement, vivant de petits métiers comme charpentier ou peintre en bâtiment et créant un milieu fertile avec les Chinois exilés dans son appartement du East Village.
Il devient l'ami du poète de la Beat Generation, Allen Ginsberg et l'admirateur de l’œuvre de Marcel Duchamp, « parce qu'il a changé la situation de l'art et les opinions des autres sur l'art ». À cette époque, il réalise beaucoup de photographies de New York et du West Side, lance des performances artistiques et crée de l'art conceptuel en modifiant des objets ready-made.
En 1987, Ai prend une part active à la fondation de la Chinese United Overseas Artists Association, dont le siège est à New York. Ai a joué un rôle majeur au sein du mouvement de l'East Village, premier collectif d'art expérimental.
Après les manifestations de la place Tian'anmen et leur dénouement tragique le , Ai Weiwei participe à une grève de la faim de huit jours devant le bâtiment des Nations unies avec un collectif appelé Solidarity for China.
Retour à Pékin
modifierEn 1993, son père étant malade, Ai revient s'installer à Pékin.
À partir de 1994, il lance avec Feng Boyi, un critique et commissaire d'exposition indépendant, une série de publications underground connues sous l'appellation Les livres du drapeau rouge (The red flag books). Certaines de ces publications ont alors une influence décisive dans les milieux artistiques chinois. C'est le cas en particulier de trois livres sur des artistes expérimentaux, Black Cover Book (1994), White Cover Book (1995) et Gray Cover Book (1997), qui font découvrir les œuvres et les personnages fondamentaux de l'art à un public chinois avide de connaissance[4].
Depuis, il produit un travail très iconoclaste, à la fois malicieux, destructeur et profond se consacrant à la culture classique chinoise et à l'environnement populaire occidental, il s'attache à la représentation du système politique centralisé et des contradictions de la modernité[12]. Ai est entouré en permanence d'artistes et d'autres acteurs.
FAKE Design
modifierAi Weiwei a assez rapidement découvert l'architecture et le design et participe activement à la création de sa résidence le Studio House en 1999, inspirée par une photographie de la Stonborough House de Paul Engelmann et Ludwig Wittgenstein à Vienne puis en 2000 le nouvel espace de la galerie China Art Archives and Warehouse (CAAW), première galerie et archive d'art contemporain en Chine, qu'il a contribué à créer en 1998.
En colère contre la Chine, il réalise en l'an 2000, l'exposition « Fuck off » avec la photo de son doigt d'honneur dirigé contre Tian'anmen (littéralement « porte de la Paix céleste »), située sur la place du même nom, se positionnant désormais comme anti-Pékin, antigouvernement et anticommuniste.
Dans "Paysages provisoires", une série de photos réalisées entre 2002 et 2005, Ai tente de présenter la réalité sociale et urbaine de la Chine, et veut témoigner « du capitalisme anarchique qui se développe et des contradictions de la modernité. Les hutongs (ruelles du vieux Pékin) ont disparu pour ériger de nouveaux bâtiments, sans respect de l'histoire ni de la culture. Ces paysages marquent la fin de l'ancien temps et l'avènement des temps nouveaux ».
Il crée en 2003 le studio d'architecture FAKE Design à Caochangdi, employant 19 personnes (en 2010). Ce studio a réalisé par exemple le Yiwu South Riverbank (Jinhua, 2002), les 9 Boxes-Taihe Complex (Pékin, 2004), ou le Gowhere Restaurant (Pékin, 2004).
En 2007, le projet « Fairytale » (« Conte de fées ») avait pour but de faire venir à l'exposition de la Documenta de Cassel en Allemagne, 1 001 Chinois, ce qui était utopique car il était très difficile pour un Chinois d'obtenir un visa de sortie.
Berlin (2015-2019)
modifierAprès avoir été privé de visa pendant quatre ans, il se rend le à Munich en Allemagne pour y retrouver son fils[13]. En 2019, il part vivre avec sa famille à Cambridge au Royaume-Uni, mais garde son studio à Berlin[6].
Début 2016, il installe une œuvre d'art dans un hall du magasin parisien Le Bon Marché[14].
Portugal
modifierDepuis fin 2019, il vit avec son fils de 11 ans à Montemor-o-Novo, ville portugaise située dans le district d'Évora, région de l'Alentejo. De juin à novembre 2021, son exposition Rapture est présentée au musée de la Cordoaria Nacional, à Belém, un quartier de Lisbonne[15].
Œuvres
modifier-
Sunflower Seeds au Turbine Hall de la Tate Modern, .
-
Colored House
-
Symbole de sa résidence surveillée
-
Lustre d'Ai Weiwei
Expositions
modifierLes œuvres d'Ai Weiwei ont été exposées aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Belgique, en Italie, en Allemagne, en Autriche, en France, en Espagne, en République Tchèque, en Suisse, en Australie, en Chine, en Corée et au Japon.
Son travail a été présenté à la 48e Biennale de Venise en 1999 (Italie) ; à la First Guangzhou Triennial de 2002 (Chine) ; à la Biennale de Sydney de 2006, Zones of Contact, (Australie)[16] ; et à la documenta 12 de Cassel (Allemagne), où il a « importé 1 000 et 1 Chinois ».
En tant qu'organisateur : « Fuck Off » (avec Feng Boyi), Shanghai, Chine, 2000.
Récemment, une exposition intitulée « Résistance et tradition » a été organisée à Séville en Espagne, dans l'ancien monastère de la Cartuja (du au ).
- Ai Weiwei, translocation - transformation, 21er Haus, Wien (Vienne/Autriche), 14.07 - 20.11.2016
- Ai Weiwei, Libero, Palazzo Strozzi, Florence, 23.09.2016 - 22.01.2017
- Ai Weiwei, D’ailleurs, c’est toujours les autres, Lausanne 22.09.2017 au 28.01.2018[17]
- Ai Weiwei, In search of humanity, Albertina Modern, Wien (Vienne/Autriche), du 16.03 au 4.09.2022
- En 2023-2024, l'exposition Ai Weiwei : In Search of Humanity, se tenant au Kunsthal à Rotterdam (Pays-Bas) lui est consacrée[18].
Sunflower Seeds
modifierUne de ses œuvres récentes les plus célèbres est l'installation Sunflower Seeds (« Graines de tournesol ») présentée dans le cadre des « Unilever Series », du au , au musée Tate Modern de Londres. L'œuvre est constituée de plusieurs millions de représentations de graines de tournesol ; elle joue avec une métaphore célèbre de Mao Zedong où le peuple chinois devait se tourner vers lui comme les tournesols vers le soleil. Cette sculpture, selon le mot choisi par la Tate Modern pour présenter l'œuvre, est constituée de petites porcelaines peintes une à une, à la main, par près de 1 600 artisans et ouvriers de la ville de Jingdezhen (dont la porcelaine est historiquement l'activité économique principale et qui traverse une crise de l'emploi sans précédent) et installées sur 1 000 m2 du hall sur lesquelles pouvaient initialement se déplacer les visiteurs[19].
Le stade national de Pékin
modifierEntre 2005 et 2008, Ai Weiwei conçoit avec les architectes Herzog et de Meuron le stade principal des jeux olympiques de Pékin, dit « le Nid d'oiseau », cependant quelques mois après son achèvement, il appellera au boycott des jeux de 2008[20].
Aï Weiwei : Entrelacs
modifierLe musée du jeu de Paume[21], à Paris, a exposé Aï Weiwei : Entrelacs du au [22]. À l'occasion de cette exposition, le journaliste Vincent Huguet, dans l'hebdomadaire Marianne du 7 au , s'interroge sur l'artiste engagé et son œuvre. Dans son article, intitulé « Les croûtes de la révolte », il rappelle que « pour un artiste si maltraité, avoir été invité par le gouvernement à concevoir le stade olympique de Pékin, avec les architectes suisses Herzog et Meuron, est pour le moins contradictoire, même s'il appelle au boycott des Jeux en 2008 ». Vincent Huguet s'inquiète du « décalage entre l'œuvre médiatique du personnage et la pauvreté artistique des œuvres exposées » au Jeu de paume. S'il reconnaît que les photographies exposées « ont une valeur documentaire », il affirme que « plastiquement et artistiquement, elles n'ont à peu près aucune qualité », pointant du doigt la série intitulée Études de perspective, « où l'on voit un doigt d'honneur devant la Maison Blanche, l'Opéra de Sydney, San Marco à Venise ou la tour Eiffel »[23].
Ai Weiwei, Fan-Tan
modifierDe juin à le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM) de Marseille présente une exposition donnant une perception de l'ensemble de son œuvre. L'artiste a accepté cette exposition car, explique Emmanuelle Jardonnet[24], son père, Ai Qing, a 19 ans, en 1929, lorsqu'il débarque à Marseille. Ai Weiwei reste marqué par une enfance où il a vu son père, de retour en Chine, chargé des tâches des plus humiliantes, victime de la révolution culturelle il fut exilé et déporté dans un camp. La commissaire de l'exposition Judith Benhamou-Huet, précise[25] qu'Ai Weiwei est "un artiste complet, dans le même esprit qu’Andy Warhol : il crée à la fois des formes – c’est un héritier des artistes surréalistes et de Marcel Duchamp – mais investit aussi de nouveaux domaines, comme les médias sociaux, où il est très efficace. Il est un pont entre la culture occidentale et la culture chinoise, même s’il s’est opposé de manière évidente au gouvernement chinois".
AI Weiwei, Raiz-Weiwei
modifierDu samedi 20 octobre 2018 au 20 janvier 2019, à Sao Paulo, l'artiste rassemble à l'Espace Oca[26], sur 4 étages et sur 8000m², 70 de ses oeuvres. La pièce maitresse présentée est monumentale et a pour nom: "Straight". Elle est présentée pour la première fois dans son intégralité. Composée de 164 poutres d'acier prises dans les décombres des écoles détruites par le puissant séisme[27] qui a fait 87000 morts en 2008 dont de nombreux enfants. A travers cette oeuvre, Ai Weiwei dénonce les défaillances des infrastructures des écoles alors que certains bâtiments administratifs n'ont pas subi les mêmes dommage. Cette mise en lumière des défaillances du Régime communiste et ses conséquences le conduiront à être emprisonné durant 81 jours avec une interdiction de quitter la Chine pendant quatre années[28]
Activité politique
modifierEn 2007, il est invité par le portail Sina à tenir un blog. Ai comprend vite le potentiel de ce nouveau média. Lorsqu'en , a lieu le tremblement de terre du Sichuan, où les bâtiments s'effondrent si facilement, Ai Weiwei, qui est architecte et connaît les normes antisismiques, se révolte et lance une enquête citoyenne. Quelque 200 bénévoles parcourent la région sinistrée pour retrouver les noms des enfants disparus, leur prénom et leur âge. Au bout d'un an, une liste de 5 335 personnes est publiée par le gouvernement. Ai rend hommage à ces enfants avec Remembering, une installation de 9 000 sacs à dos.
En , aux prises avec la censure entourant toute tentative de commémorer le massacre de la place Tiananmen, il met en ligne un poème intitulé ironiquement Oublions[29]. Ai exprime sur twitter ses opinions sur Tian'anmen, le Tibet, la police secrète… Sur le net, il est surnommé « Ai Welai », littéralement « celui qui aime l'avenir ». En représailles, les autorités ferment ses comptes sur le net chinois, des hommes de main le passent à tabac et détruisent son nouvel atelier de Shangaï. Son blog, hébergé par Sina, est fermé malgré ses 13 millions d'abonnés[30].
Le , Ai Weiwei, qui souhaitait rejoindre la Corée du Sud, indique que la police a refusé sa sortie du territoire chinois car il mettait alors « en danger la sécurité nationale ». Il analyse ainsi cette interdiction : « la police et les autorités aux frontières augmentent leurs efforts pour empêcher des membres éminents de la société civile chinoise de voyager à l'étranger à l'approche de la cérémonie du prix Nobel de la paix » attribué au Chinois Liu Xiaobo qui est actuellement emprisonné[31].
Ai WeiWei a été sélectionné par le site Sina.com dans la liste visant à élire l'« artiste de l'année » en dépit du gouvernement chinois[32].
Le , Ai Weiwei, en partance pour Taipei, via Hong Kong, est interpellé par la police à l'aéroport international de Pékin avant qu'il ne puisse prendre un avion. Son atelier et son domicile sont fouillés et des ordinateurs sont confisqués le même jour, alors que la Chine voit la plus large répression qu'elle ait connue depuis dix ans, commencée en [33]. Accusé d'évasion fiscale, il est mis au secret et disparaît. Le une manifestation de soutien s'est tenue à Hong Kong pour demander « la libération de ce militant des droits de l'homme[34] ». En , Li Xianting (en) et Zhang Yihe écrivent un essai pour soutenir Ai Weiwei : Ai Weiwei est un artiste créatif[35].
Le , l'artiste a pu brièvement rencontrer sa femme dans le lieu secret où il est détenu[36]. Suivant le témoignage de celle-ci, Ai Weiwei n'a subi aucune forme de torture de la part des autorités chinoises[37] et il a aussi reçu les soins demandés par son état de santé (diabète et hypertension[38]).
Ai Weiwei, défendu par l'avocat Pu Zhiqiang, est libéré sous caution, annonce, le , la police pékinoise, selon le site de l'agence officielle Xinhua. Ai Weiwei faisait l'objet d'une enquête pour crime économique, qui a conclu « à une importante évasion fiscale par la société Fake, que l'artiste contrôle, et à la destruction intentionnelle de pièces comptables. » La libération sous caution est décidée « du fait de la reconnaissance par Ai Weiwei de ses infractions, en considération de son état de maladie chronique, et de son intention répétée de rembourser au fisc les sommes manquantes ». Il voit cependant sa liberté de parole et d'intervention limitée, comme condition de sa libération[39]. Selon Laetitia Cénac, il aurait cependant subi une cinquantaine d'interrogatoires et aurait été obligé d'enregistrer autant d'autocritiques devant la caméra. La solidarité mondiale des internautes et des musées a permis de récolter plus d'un million d'euros soit un montant supérieur à l'amende. Depuis les autorités l'accusent de pornographie, alléguant l’œuvre « le Tigre et les huit seins » sur laquelle Ai Weiwei pose nu sur une chaise traditionnelle, entouré de quatre jeunes femmes dévêtues[40].
En 2013, Ai Weiwei est devenu l'ambassadeur de l'association Reporters sans frontières[41],[42], et a offert cent de ses photos pour créer un album papier et numérique, dont les bénéfices permettent de financer des projets de défense de la liberté de l'information[41],[43]. Toujours en 2013, il conçoit la couverture de l'ouvrage de Tsering Woeser concernant l'auto-immolation de 125 Tibétains entre 2009 et 2013. Woeser rapporte ses propos sur le sujet : « Le Tibet fait subir un interrogatoire extrêmement sévère à la Chine, aux droits humains de la communauté internationale et aux normes de la justice. Personne ne peut y échapper ni ne peut l’esquiver. Actuellement, le déshonneur et la honte frappent tout le monde. »[44].
Au cours de l'année 2015, Ai Weiwei se rend sur l'île de Lesbos pour montrer le quotidien des migrants et des réfugiés qui transitent par l'île grecque. Il partage ses photos avec sa communauté, notamment au moyen du réseau social Instagram. Au cours de ce voyage, il fait état de son souhait de créer un mémorial, afin de garder la mémoire des individus qui ont péri en mer[45].
En 2016, il fait fermer son exposition à Copenhague en signe de protestation contre la décision du gouvernement danois de confisquer les objets de valeur des réfugiés[46]. La même année, il fait recouvrir les colonnes du Konzerthaus de Berlin de gilets de sauvetage récupérés sur les plages grecques et ayant été utilisés par des migrants pour traverser la Méditerranée. Il a aussi monté l'installation F Lotus dans les Jardins du Belvédère à Vienne, pour attirer l'attention sur cette problématique[47]. La photo d'Ai Weiwei étendu sur une plage de Lesbos, mimant la posture du petit Aylan Kurdi noyé en 2015, a suscité de vives réactions. Certains l'accusent de vouloir attirer l'attention, mais l'artiste cherche surtout à dénoncer l'inaction face au drame des réfugiés malgré l'émoi suscité par la photo d'Aylan. Depuis, des centaines d'autres enfants sont morts noyés en Méditerranée. Ai Weiwei veut choquer par cette image forte pour relancer le débat et pousser à l'action, au-delà des simples discours et promesses des politiques. Son geste provocateur vise à rappeler l'urgence de la situation que la photo d'Aylan n'a pas suffi à résoudre[48]
En 2021, à la suite de la fermeture de son compte en banque, l'artiste dénonce une manipulation supplémentaire du Crédit suisse[49] rappelant son financement durant la Seconde Guerre mondiale d'un contingent de 12 000 anciens nazis en Argentine via un compte estimé à 35 milliards d'€, spoliés à des familles juives[50].
En 2022, il déclare qu'à maints égards les Chinois sont plus libres que les Occidentaux[51].
Distinctions
modifier- Membre de l'Académie des arts de Berlin (élu le )[52],[53].
- Première position dans le classement « Power 100 » de la revue d'art contemporain ArtReview en 2011. Selon le journal : « Son militantisme a rappelé comment l'art peut atteindre un large public et se connecter au monde réel. »[54].
- Prix Ambassadeur de la conscience 2015 reçu conjointement avec la chanteuse Joan Baez. Ce prix est décerné par l'ONG Amnesty International à des personnes ayant défendu et amélioré la cause des droits humains et fondamentaux au cours de leur vie[55].
- Prix Cornell-Capa décerné en 2012 par le Centre international de la photographie.
Publications
modifier- Ai Weiwei, Ai Weiwei: Sunflower Seeds, TATE Publishing, , 144 p. (ISBN 978-1854378842)
- Ai Weiwei, Ai Weiwei's Blog: Writings, Interviews, and Digital Rants, 2006-2009, MIT Press, , 320 p. (ISBN 978-2-916583-05-1)
- Illustration de l'ouvrage de Tsering Woeser Immolations au Tibet - La Honte du monde, préface Robert Badinter, éditions Indigènes, 2013.
- Ai Weiwei, t. 43, Reporters sans frontières (RSF) / édition illustrée, coll. « 100 photos pour la liberté de la presse », , 132 p. (ISBN 978-2362200205)[56].
- Ai Weiwei, Dans la peau de l'étranger. En guise de manifeste, Actes Sud, (ISBN 978-2330137410)
- Ai Weiwei (trad. Louis Vincenolles), 1 000 ans de joies et de peines, Buchet-Chastel, (ISBN 2283034647)
Films
modifier- Ai Weiwei: Never Sorry : film documentaire américain réalisé par Alison Klayman en 2012 ;
- Enquête vidéo sur l'affaire Qian Yunhui réalisée par Ai Weiwei. Le documentaire d'une durée de 1 heure et 42 minutes a été posté sur YouTube en 2013. Selon Ai Weiwei, il est impossible de connaître les circonstances exactes de la mort de Qian Yunhui, car « en Chine, la vérité n'existe pas »[57] ;
- Human Flow : film documentaire réalisé par Ai Weiwei et co-produit par Participant Media (USA), AC Films et Ai Weiwei Studio (Allemagne), sorti en 2017.
- Coronation (en) : documentaire sur le confinement de Wuhan[58]
- Ai Weiwei: L'art de la Dissidence: film documentaire français réalisé par Caroline Benarrosh en 2024 produit par France Télévision 52 mn
Notes et références
modifier- « Ai Weiwei », Interview Magazine (consulté le )
- Séverine Arsène, « Art, blog et dissidence. Portrait d’Ai Weiwei », laviedesidees.fr,
- Charte 08, https://www.ldh-france.org/wp-content/uploads/IMG/pdf/Charte_08_traduction_revisee.pdf
- (en) Merewether, Charles, Editor.~Essays by Jonathan Napack and Chin-Chin Yap. Ai Weiwei, Works: Beijing 1993-2003, Pékin, Timezone 8 Ltd., 2003.
- Philippe Dagen, « L’art du combat d’Ai Weiwei », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- (en-GB) Kate Connolly, « Ai Weiwei: I'm looking forward to arguing with Brits about Brexit », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
- Séverine Arsène, « Ai Weiwei, artiste et activiste chinois », Congrès de l’Association Française de Sociologie, (lire en ligne)
- (en) Clifford Thompson, Miriam Helbok et Mari Rich, Current biography yearbook 2011, New York, H.W. Wilson, (ISBN 9780824211219, lire en ligne), p. 12-15
- (en) Charles Merewether, Ruins in Reverse, in Ai Weiwei: Under Construction, University of New South Wales press, Sydney, 2008, p. 29.
- (en) « Ai Weiwei: Fragments, Voids, Sections and Rings », sur Archinect (consulté le )
- « Les Etoiles, mouvement dissident de l’art contemporain chinois », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- (en) Art Facts Net articles.
- AFP agence, « Ai Weiwei en Allemagne après quatre ans sans passeport », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
- Valérie Duponchelle, « Ai Weiwei, le dernier empereur », lefigaro.fr, 27 janvier 2016.
- Réfugié au Portugal, Ai Weiwei lance à Lisbonne sa plus grande exposition. Courrier International, 4 juin 2021.
- (en) Asia Pacific Triennial artists
- Musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne, « En cours: Musée des Beaux-Arts », sur www.mcba.ch (consulté le )
- (en) Ai Weiwei : In Search of Humanity
- « Cric Crac - Les graines de tournesol de l’artiste Ai Weiwei ne vont plus crisser » dans Le Monde du 15 octobre 2010 et :« Ai Weiwei l'audace emprisonnée », dans Le Monde Magazine du 20 mai 2011, par Philippe Dagen.
- Ai Weiwei, « Why I'll stay away from the opening ceremony of the Olympics », The Guardian, (lire en ligne, consulté le ).
- http://www.jeudepaume.org/index.php?page=article&idArt=1500&lieu=1 : Site du Jeu de Paume.
- (en) « Standardsandmore.fr », sur standardsandmore.fr (consulté le ).
- Vincent Muguet, Les croûtes de la révolte, Marianne, 7-12 avril 2012, p. 76-78.
- Emmanuelle Jardonnet, « La route du soi d’Ai Weiwei, de Pékin à Marseille », Le Monde, , p. 13
- « Ai Weiwei Fan-Tan, entretien avec Judith Benhamou-Huet, commissaire de l’exposition. », sur mpucem.org,
- (pt-BR) por Redação, « Oca do Ibirapuera », sur O maior arquivo sobre parques urbanos do Brasil, (consulté le )
- « Au Sichuan, après le séisme de 2008, le « miracle » de la reconstruction et l’effacement des victimes », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Ai Weiwei exposé sur cinq étages à São Paulo », sur Franceinfo, (consulté le )
- « […] Oublions chaque cas de persécution, chaque cas d'humiliation, chaque massacre et chaque tentative de le cacher, chaque mensonge, chaque mort. Oublier chaque moment de souffrance, et oublier chaque moment d'oubli. […] » Pierre Haski, « Oublions », quand un artiste chinois tente de ne pas oublier Tiananmen sur Rue89, nouvelobs.com.
- Frédéric Martel, Smart, enquêtes sur les internets (ISBN 978-2-0813-0785-8)
- L'Express du 3 décembre 2010 : « Avant le Nobel, un artiste chinois empêché de quitter le pays ».
- « Les votes désignant Ai Weiwei comme "artiste de l’année" déclenchent la panique de la censure chinoise », sur le site Artinfo France.
- « L’artiste Ai Weiwei interpellé », Courrier international, 4 avril 2011, consulté le 6 avril 2011.
- L'Express.fr du 17 avril 2011 : « Manifestation de soutien à l'artiste Ai Weiwei à Hong Kong »
- (en) Li Xianting and Zhang Yihe: Ai Weiwei Is a Creative Artist China Digital Times (en), 2 juin 2011
- « L'artiste et activiste chinois Ai Weiwei n'aurait pas été torturé », Le Monde, 16 mai 2011.
- « L'artiste et activiste chinois Ai Weiwei n'aurait pas été torturé », Le Monde, (lire en ligne)
- (en) Michael Wines, « China Allows Dissident Artist’s Wife to Visit Him », The New York Times, 16 mai 2011.
- (en) China demands Ai Weiwei pay $1.85 million in taxes, fines, Reuters, June 28, 2011.
- Laetitia Cénac, Ai Weiwei, objectif de conscience, Le Figaro Madame, 17 février 2012, pages 40 à 43.
- Dominique Poiret, « Ai Weiwei en campagne pour Reporters sans frontières », sur liberation.fr, Libération, (consulté le ).
- http://fr.rsf.org/ai-weiwei-ambassadeur-de-reporters-20-06-2013,44826.html
- Stéphane Reynaud, « Les photos d'Ai Weiwei sur iPad », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
- Tsering Woeser parle de son livre
- Ai Weiwei veut ériger un mémorial aux migrants à Lesbos, Le Monde, 2 janvier 2016
- (en-GB) « Ai Weiwei closes Denmark exhibit in protest against asset seizures - BBC News », sur BBC News (consulté le )
- Zone Arts- ICI.Radio-Canada.ca, « Ai Weiwei décore les jardins du Belvédère, à Vienne, avec des gilets de sauvetage », sur Radio-Canada.ca (consulté le )
- « Les organisations de la société civile rapportent que des consultations ne sont pas systématiquement utilisées pour orienter les politiques nationales de développement », sur dx.doi.org, (consulté le )
- https://news.artnet.com/opinion/ai-weiwei-credit-suisse-m-museum-2005236
- L'incroyable fichier découvert en Argentine sur l'argent des nazis, franceinfo
- Frédéric Koller, « Ai Weiwei: «A maints égards, les Chinois sont plus libres que les Occidentaux» », sur Le Temps,
- (de) Ai Weiwei - Seit 2011 Mitglied der Akademie der Künste, Berlin, Sektion Bildende Kunst sur le site de l'Académie des arts de Berlin
- « Ai Weiwei a été élu à L’Académie allemande des arts », sur artmediaagency.com, 10 mai 2011.
- (en) http://www.artreview100.com/people/751/
- « Ai Weiwei, prix Ambassadeur de Conscience 2015 », Amnesty France, (lire en ligne, consulté le ).
- Dominique Poiret, « Ai Weiwei en campagne pour Reporters sans frontières », sur Libération,
- Le Point magazine, « L'artiste Ai Weiwei publie une enquête sur une mort très suspecte en Chine », sur Le Point, (consulté le )
- « Wuhan confinée : le regard glaçant d'Ai Wei Wei », sur franceculture.fr, (consulté le ).
Annexes
modifierArticles connexes
modifierBibliographie
modifier- John M. Cunningham, Dictionnaire des Sculpteurs : Les Dictionnaires d'Universalis, Encyclopaedia Universalis, , 1453 p. (ISBN 9782341002769, lire en ligne)
Liens externes
modifier- Ressources relatives aux beaux-arts :
- Ressources relatives à l'audiovisuel :
- Ressources relatives à la musique :
- Ressources relatives à plusieurs domaines :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Le blog d'Ai Wewei (en chinois)
- Reportage de Papiers de Chine : A Caochangdi, dans les espaces particuliers de Ai Weiwei
- Ai Weiwei censuré dans l'édition chinoise de Newsweek (début )
- Evidence émission d'ARTE du 2014/04/02 sur l'installation de l'exposition au Martin Gropius Bau