Par Camille de Lapoyade et Élian Barascud
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Depuis 2006, Philippe Dhondt, alias Boris, interprète de « Soirée Disco » entre autres, coule une vie paisible dans un recoin du Lot-et-Garonne. Il revient sur ses années folles, à la fin des années 1990, et sur cette aura qui entoure encore son personnage

Son personnage est né un peu par hasard. Sa personne, elle, était loin d’avoir une ligne toute tracée pour devenir un jour numéro un du Top 50. Après un bac littéraire raté, son père lui trouve un travail dans le BTP. « Ce n’était pas fait pour moi. » Il tente alors le concours de gendarmerie, qu’il rate également, puis celui de la police, qu’il réussit. « Ce que je voyais dans la police, c’était le CRS sur la plage, à passer son été en slip. Mais je savais bien que j’allais d’abord être gardien de la paix à Paris. » Alors quand une radio locale de son nord natal lui propose un petit contrat payé au lance-pierre, il saute sur l’occasion. À partir de là, Philippe Dhondt a pioché dans son imaginaire délirant, avec en point d’orgue ce titre sur lequel les ados des années 1990 ont tant transpiré : « Soirée Disco ». La légende Boris était en marche.

Naissance de Boris

Retour à la fin des années 1980-début 1990. Philippe est animateur et DJ sur Galaxie Radio, qui émet dans le nord de la France. « À l’époque, on est les seuls à diffuser de l’electro. J’étais tout seul pendant mon émission et la dernière heure je m’ennuyais un peu. J’ai donc commencé à inventer un personnage à qui il arrivait des aventures abracadabrantes. Il s’appelait Murphy, en référence à ‘‘Robocop’’. »

« Aujourd’hui, personne ne me diffuserait. Il y a des époques pour sortir »

Jusqu’au jour où un auditeur l’interpelle et lui demande une dédicace, avec son nom. Un auditeur tellement insistant que Philippe finit par accéder à sa requête et invente une histoire extravagante pendant deux minutes avant le lancement du morceau de musique. « J’ai mentionné six fois son nom. Il s’appelait Boris. C’était un peu rare à l’époque, un peu international. Le personnage était né. Boris a vécu pendant un an, tout en improvisation. » En parallèle, Philippe intègre d’autres projets, toujours un peu caché. La momie de Pleasure Game, qui scande « Le Dormeur doit se réveiller », c’est lui. La phrase qu’on entend aussi bien dans les stades qu’au fin fond de la campagne à l’apéro, « il est vraiment phénoménal, lalalalala », c’est lui aussi.

Nostalgie et rave party

Il ose, il teste, il tente. Avec l’envie, mais sans forcément grande conviction. « Je ne suis pas chanteur, je ne suis pas musicien, je ne fais pas de rimes, je raconte des délires psychédéliques en m’inspirant des histoires que tout le monde me raconte… Mais avec une ligne de basse puissante, je sors « Soirée Disco », que les discothèques vont diffuser avant que cela soit repris par toutes les radios. Ce titre, mais aussi le suivant, ‘‘Miss Camping’’, visent un public populaire, dansant. Les autres titres de l’album sont plus psychédéliques, impossibles à diffuser en radio. C’est vraiment un autre public. »

Deux publics qui valent à Boris d’être aujourd’hui diffusé aussi bien dans les soirées des nostalgiques des années 1990 que dans les rave parties. Et même d’être repris par des ados dans des vidéos TikTok. Sa musique continue de vivre sa vie, sans l’influence des radios ou des boîtes de nuit. « De toute façon, aujourd’hui, personne ne me diffuserait. Il y a des époques pour sortir. » L’époque où le phrasé était encore dans beaucoup de têtes, avec les tubes de Taxi Girl ou Jakie Quartz, inspirations de Philippe Dhondt. « Dans les histoires de Boris, il y a aussi du Genesis des années 1970. »

Philippe Dhondt vit depuis 2006 dans la campagne villeneuvoise, du côté de Monflanquin.
Philippe Dhondt vit depuis 2006 dans la campagne villeneuvoise, du côté de Monflanquin.
Thierry Breton/ « SUD OUEST »

Côté coulisses et côté scène

Aujourd’hui, Philippe est loin d’avoir raccroché les pattes d’eph’. De mars à décembre, il passe ses week-ends sur scène, souvent accompagné des stars des années 1980 et 1990. Mais « essentiellement dans le nord de la France. Là-bas, le public est très festif, très réactif. On refait vivre nos chansons sans la pression de vendre des disques. On y retrouve aussi bien des nostalgiques de 40-45 ans que des jeunes de 17 ans qui s’éclatent comme leurs parents à l’époque. » Si à la fin des années 2000, dix ans après le succès, « je suis devenu un peu ringard », la vague a repris dix ans plus tard. « Il y a un cap après 20 ans », sourit-il, un éclat espiègle dans l’œil. Et depuis l’an dernier, Boris est même diffusé sur Radio Nostalgie. Voilà pour le coup de vieux.

Boris continue d’arpenter les scènes et sait toujours chauffer son public. Sa marque de fabrique ? « Top délire méga groove », bien entendu, mais aussi savoir faire chanter des refrains aux spectateurs.
Boris continue d’arpenter les scènes et sait toujours chauffer son public. Sa marque de fabrique ? « Top délire méga groove », bien entendu, mais aussi savoir faire chanter des refrains aux spectateurs.
Philippe Dhondt

En parallèle de son personnage scénique, Philippe Dhondt est comédien voix off, essentiellement pour des spots publicitaires radiophoniques. « J’ai toujours eu ces deux cordes à mon arc, deux métiers, que j’adore. Tant que je saurais parler, je ne m’inquiéterai jamais de demain. Si sur scène il faut continuer à faire attention à son image, ce n’est pas le cas pour la radio. Et même, avec l’âge, la voix se bonifie. Je suis meilleur aujourd’hui qu’il y a dix ans. » Ce métier, Philippe l’apprécie aussi pour son côté anonyme.

Le refuge villeneuvois

Enfant, il a passé toutes ses vacances du côté de Monflanquin.
Enfant, il a passé toutes ses vacances du côté de Monflanquin.
Philippe Dhondt

Cet anonymat, mais aussi le calme loin des spots et des paillettes, Philippe Dhondt l’a trouvé au quotidien, dans un petit village du Villeneuvois. « J’y viens depuis 1974, j’y passais tous mes étés avec mes parents, du côté de Monflanquin. Ils ont fini par y faire construire leur maison de vacances. Le jour où le haut débit est arrivé, en 2006, avec la possibilité de travailler depuis chez soi, je suis venu m’y installer. » Un lieu gardé secret, qui n’aura jamais vu un appareil photo de journaliste ou une caméra de télévision franchir le seuil.

Le jeune Philippe, en 1976, en train de traire des chèvres dans la campagne villeneuvoise.
Le jeune Philippe, en 1976, en train de traire des chèvres dans la campagne villeneuvoise.
Philippe Dhondt

Il y coule les jours paisibles d’un citoyen lambda, « je fais mes courses à Casino et chez Gammvert », « même si je bosse sept jours sur sept entre la radio et les galas ». Et il participe également aux petits événements locaux, comme la soirée organisée à Boudy-de-Beauregard pour soutenir Louis, le soir de la finale de la « Star Academy ». « Ce n’est pas un bon souvenir, parce que je croyais vraiment qu’il allait gagner. Il est rayonnant, il est vraiment bon. Pour moi, c’était lui le gagnant. Moi j’ai été au Top 50 sans chanter. Lui est plein de talent, différent de tout ce qu’on voit et ça ne paye pas ? »

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Le jeune Louis et le vieux briscard de la techno, celui qui sait chauffer un public comme personne, ont néanmoins ce point commun : ils se métamorphosent quand ils ont un micro dans la main. « Pourquoi on continue tous à tourner ? Parce que ce n’est pas qu’une chanson de Dalida, c’est la réalité : on veut tous mourir sur scène. »

« Ce n’est pas qu’une chanson de Dalida, c’est la réalité : on veut tous mourir sur scène »
« Ce n’est pas qu’une chanson de Dalida, c’est la réalité : on veut tous mourir sur scène »
Thierry Breton/ « SUD OUEST »