Notes
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[1]
Docteur en sociologie, Université Perpignan Via Domitia. girard@univ-perp.fr
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[2]
Docteur en sciences économiques, Université Perpignan Via Domitia. bscheou@univ-perp.fr
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[3]
Dans la perspective méthodologique ouverte par les travaux de Olivier de Sardan (2007, 1995) et Bierschenk, Chauveau et Olivier de Sardan (2000).
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[4]
Il nous semble important de ne pas citer l’association car l’analyse présentée, effectuée en 2009, résulte en quelque sorte d’une “photographie” prise à cette date, qui ne saurait être associée de manière permanente à ATC. D’ailleurs, le renouvellement de ses dirigeants, intervenu depuis, a eu pour conséquence de nombreux changements dans la stratégie mise en œuvre. Pour autant, nous considérons que les constats effectués et les enseignements que nous en retirons ont, eux, une portée plus large, dans le sens où nombre de projets actuels et futurs peuvent leur correspondre, au moins en partie.
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[5]
Nous utiliserons principalement deux documents internes de l’association, tous deux rédigés par son fondateur. Le premier est un dossier de référence dont la dernière version date de septembre 2009, nous le désignerons par (DossRéf, 2009), il synthétise l’ensemble de la méthodologie du programme mis en œuvre par l’association. Le second correspond au programme d’action de l’association pour la période 2005-2007, programme déposé pour un financement qu’elle a obtenu avec un décalage d’environ deux ans, nous nous y référerons par (ProAc, 2005). Nous utiliserons aussi la brochure promotionnelle de septembre 2009, identifiée par la référence (ProgSej, 2009).
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[6]
Une charte a été élaborée en mai 2002 par l’association et les représentants de ses trois villages partenaires à l’époque. Cette charte précise les engagements des villages, de l’association et des voyageurs. Les nouveaux villages partenaires devront signer et respecter ces engagements.
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[7]
Le fait d’attribuer une valeur économique à la tradition ouvre la porte à l’exploitation économique de celle-ci et introduit un nouveau paramètre qui rend plus complexe la position des membres des communautés, lesquels ne sont plus simplement partagés entre valeurs traditionnelles et modernité mais entre tradition “authentique”, valeurs traditionnelles monnayables et modernité.
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[8]
Au niveau touristique, l’expérience avait montré que les obligations générées par l’accueil en famille, en pesant sur les membres de celle-ci comme sur l’hôte accueilli, pouvait nuire à la rencontre et qu’il était préférable d’organiser les moments d’échanges en fonction des temps de liberté des familles.
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[9]
Notons qu'ATC a organisé un forum réunissant ses partenaires à l’occasion des dix ans de l’association avec pour objectif de tirer un bilan collectif du projet, ce qui pouvait justement être un espace approprié pour un tel processus de négociation. Cependant, sans doute, le souci de trop cadrer méthodologiquement le forum et la volonté de l'utiliser également pour promouvoir l’action de l’association auprès de ses partenaires institutionnels n’ont pas permis une parole suffisamment libre en public pour qu'il soit possible de discuter, et même d'évoquer, les différents points de tension existants et de progresser à leur égard.
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[10]
Cette suspension, intervenue au milieu de l’année 2008, ne concernait pas les séjours déjà programmés jusqu’à la fin de l’année 2008 et n’a donc pas eu d’effets sur la fréquentation et les revenus en découlant, nécessaires tant au village qu’à l’association, la suspension ayant été levée avant les séjours de 2009.
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[11]
Dans ce cas, les conflits conduisent à des blocages au lieu de générer des “dynamiques de compromis”, pour reprendre le concept proposé par Boltanski et Thévenot (1991).
1 Refusant la dichotomie entre un “bon” tourisme, qui serait automatiquement porteur de développement économique, social et culturel pour les populations locales et “un tourisme de masse” nécessairement malfaisant pour celles-ci, au profit d’une démarche d’identification et de prise en compte des problèmes inhérents à chaque forme de tourisme, nous nous intéressons aux conditions de réussite des formes de tourisme “alternatives”. Nous le faisons en interrogeant les illusions culturaliste et participative qui affectent le tourisme alternatif lorsqu’il est trop certain qu’il suffit de mettre en œuvre une forme de tourisme qui encourage la participation de la population, pour qu’à partir d’une méthodologie simple et universalisable, couplée aux bonnes intentions de chacun, le tourisme produise les résultats escomptés. Ce questionnement ne s’inscrit aucunement dans une perspective d’abandon des expérimentations de tourisme communautaire mais voudrait être une contribution réflexive à celles-ci à travers la prise en compte des conséquences parfois non vues et souvent non voulues de ces illusions.
2 Par « illusion participative » (Blanc-Pamard et Fauroux, 2004) nous nous référons à la croyance selon laquelle l’offre de participation à un projet de développement faite à une population conduit celle-ci à s’en saisir en tant que communauté démocratique, ce qui assurerait le succès de l’entreprise. Cette croyance conduit à soustraire de l’offre de participation, la question de la négociation du cadre de l’action. Autrement dit, dans les démarches de participation, le modèle d’action du “développement communautaire” reste le plus souvent à l’écart de ce qui peut se négocier : il s’agit pour la population de participer à des projets d’action selon le modèle du “développement communautaire” sans réellement participer à l’élaboration, voire à la révision, de ce modèle. La vigilance que nous voulons exercer à l’égard de l’illusion participative, et la mise en avant du fait que la participation de la population est tout autant un problème qu’une solution, n’invalide aucunement le projet participatif. En revanche, il appelle à ce qu’il intègre toujours, sans crainte d’y voir un signe d’échec de son action, la prise en compte tant des effets non voulus de sa mise en œuvre que des logiques de réappropriation de ces dispositifs par les acteurs locaux et des conflits que celle-ci génère ou dans lesquels elle vient s’inscrire [3]. Il s’agit donc d’être attentif aux enjeux souvent refoulés de la négociation possible du cadre de l’action dans laquelle les acteurs locaux sont invités à participer, ici : le développement communautaire.
3 Par “illusion culturaliste” nous désignons la conjonction d’au moins deux tendances : (1) faire comme si les cultures étaient des totalités homogènes aux frontières bien délimitées, telles des îles ; (2) faire comme si tous les individus étaient des membres d’une culture-île de telle façon que tous leurs comportements puissent s’expliquer comme la simple expression, ou actualisation, de leur culture, ou à défaut comme déviance (Augé, 1992, 57-68). Le plus souvent l’illusion culturaliste conduit au mythe de l’Authenticité : voir et célébrer les cultures-îles comme des traditions hors de l’histoire dont l’authenticité est menacée par la modernisation, force de progrès uniformisante qui impose les mêmes normes marchandes et industrielles et fait glisser les individus d’une appartenance structurante à une culture (où chacun agissait conformément aux valeurs de sa culture) à l’individualisme conduisant chacun à n’être plus qu’animé par la recherche de la satisfaction de ses intérêts personnels.
4 Nous allons appliquer notre réflexion à l’action d’une association française que nous désignerons par le nom fictif d’ATC (Association de tourisme communautaire) [4]. Nous choisissons de parler à son propos de tourisme solidaire communautaire pour signifier que cette association a opté pour une forme spécifique de tourisme solidaire, celle reliée à l’objectif de développement communautaire. Depuis plus de dix ans, ATC organise et commercialise un tourisme solidaire dans plusieurs communautés rurales dont deux au Bénin que nous avons choisies pour illustrer notre propos.
5 Dans un premier temps, nous développerons le projet expérimental mis en œuvre par ATC en mettant en évidence le modèle normatif sur lequel il repose. Puis, dans un second temps, après avoir précisé les illusions que peut véhiculer ce modèle, nous montrerons comment elles tendent à accroître les difficultés du projet sur le terrain, en générant une absence de prise en compte des logiques d’appropriation du projet par les différents acteurs.
1. L’ASSOCIATION ATC : UN PROJET EXPÉRIMENTAL DE TOURISME SOLIDAIRE BASÉ SUR UN MODÈLE NORMATIF DE DÉVELOPPEMENT COMMUNAUTAIRE
6 Le tourisme solidaire est l’expression d’une solidarité avec les catégories de population les plus défavorisées des pays à faible produit intérieur brut parmi lesquels sont choisies les destinations. À ce titre, ce type de tourisme paraît donc directement correspondre aux objectifs consensuels de réduction de la pauvreté. ATC, à travers son inscription affirmée dans le mouvement du commerce équitable, intègre la question de la pauvreté à travers les rapports sociaux d’échange, lesquels sont, de fait, asymétriques et produisent des inégalités illégitimes assimilables à un rapport de domination. Ce n’est pas alors la pauvreté en soi qui est à traiter, c’est un problème de rapports sociaux d’échange. S’il n’est ni possible, ni souhaitable, de transformer ces rapports sociaux dans leur globalité en une fois, on peut créer des circuits alternatifs fonctionnant à partir de rapports sociaux d’échanges équitables. Le pari est que ceux-ci ne vont pas se cristalliser en simples niches s’ajoutant aux grandes tendances du marché touristique, mais inspirer des transformations au niveau du tourisme de masse lui-même, ce qui suppose la sensibilisation d’un nombre croissant de citoyens aux enjeux et aux possibilités d’un échange touristique équitable, et sur une mutation des demandes touristiques qui pourrait en découler et obliger l’offre touristique dominante à se transformer pour mieux satisfaire aux exigences d’un échange touristique équitable. Enfin, ATC vise une “vraie rencontre interculturelle” qui serait esquivée, ou manquée, dans les tourismes classiques, et notamment dans celui de masse. Cette option peut se rattacher à la lutte contre la pauvreté en un sens élargi, non utilitariste : permettre une richesse des échanges culturels et de la sociabilité contre la pauvreté de ces échanges dans les interfaces touristiques classiques (Girard et Schéou, 2008). Le tourisme solidaire vers des communautés villageoises auquel œuvre ATC combine l’objectif d’aide au développement d’une communauté villageoise à partir de ses choix (le développement communautaire) et celui de réaliser la rencontre touristique comme “vraie rencontre interculturelle”.
7 Précisons la façon dont ATC présente elle-même ses objectifs. Son projet repose sur la mobilisation d’une communauté d’accueil à l’échelle d’un village et de son terroir autour de l’accueil de petits groupes de voyageurs invités à découvrir leurs traditions, leur culture, leur environnement, leur organisation sociale…, sur la base d’un programme d’activités élaboré par le village sur des périodes allant du week-end au séjour d’immersion d’une dizaine de jours (ProAc, 2005, 6) [5]. L’association choisit ses pays de destination « pour l’accueil remarquable de leurs habitants, et aussi pour la présence de communautés qui s’organisent pour valoriser leur village et promouvoir leur culture » (ProgSej, 2009, 5). Dans le dépliant de 2009 présentant ses « circuits et séjours découvertes en Communautés villageoises », l’association se félicite de permettre « depuis maintenant dix ans de voyager autrement en proposant un tourisme fondé sur la rencontre et les échanges dans des villages et communautés d’accueil ».
8 Les fondateurs de l’association ont fixé comme objectif premier à ce “tourisme communautaire” et au programme qu’ils ont conçu « de contribuer au développement durable de la communauté d’accueil » (DossRéf, 2009, 12). « Dans cette optique, les initiateurs du projet ont d’une part privilégié une approche communautaire de l’organisation touristique seule à même, de leur point de vue, de permettre aux communautés d’accueil d’en garder la maîtrise et le contrôle, et d’autre part ont veillé à replacer ce projet touristique dans une dynamique de développement local : le tourisme devant venir comme un levier favorisant le développement et non comme une fin en soi » (ProAc, 2005, 6).
9 Pour l’association, les principaux bénéficiaires du projet sont donc les communautés villageoises, « et en premier lieu les populations dans leur ensemble au travers, d’une part des équipements collectifs et microprojets financés grâce à l’apport financier de l’activité et qui améliorent leur cadre de vie et d’autre part, de la valorisation de leur propre image par cette activité d’échanges et de rencontres » (ProAc, 2005, 25). Plus précisément, les bénéficiaires du projet identifiés par ATC sont : (a) les instances villageoises de développement « qui se trouvent renforcées dans leur capacité d’organisation et de gestion et leur autonomie financière », (b) les instances de gestion de l’activité touristique qui « ont une large autonomie de fonctionnement », (c) le personnel d’accueil, « choisi et rétribué par le village pour assurer au quotidien la gestion et l’animation de l’activité touristique ; […] ils sont pleinement responsables de leurs activités et participent directement à leur auto-évalaution grâce aux outils mis en place au sein du programme » et, enfin, (d) les artisans, maraîchers, éleveurs des terroirs d’accueil « qui trouvent de nouveaux débouchés à leur production et une valorisation de leur savoir-faire traditionnel » (ProAc, 2005, 25).
10 Le modèle imaginé par le fondateur de l’association est basé sur un schéma méthodologique et technique complet et extrêmement précis qui régit l’ensemble des aspects du programme : « cette ‘‘modélisation’’ qui permet de faciliter les transferts d’expérience et les échanges intervillageois intervient à différents niveaux : au plan des principes éthiques : chaque village d’accueil doit adhérer aux principes de la Charte [6] […] et respecter la grille des critères de qualité des séjours […] ; au plan du schéma d’organisation ‘‘institutionnelle’’ de l’activité touristique, au niveau des villages (conseil de développement, conseil de gestion, équipe d’accueil) et des pays (fédération des villages au sein d’une union nationale) ; au plan des outils techniques d’accompagnement : outils de formation (conception de référentiels de formation et de modules pédagogiques), outils d’accompagnement (grille d’auto-évaluation) » (ProAc, 2005, 9).
11 L’organisation envisagée suppose l’existence de trois composantes qui doivent être absolument représentatives de la communauté. En premier lieu, le conseil de développement au niveau du village, « responsable du programme vis-à-vis de la communauté et des partenaires du programme ; représente l’organisation faîtière qui rassemble démocratiquement les forces vives de la communauté villageoise : les sages et anciens de la communauté, les associations socioculturelles, les groupements économiques, les quartiers, les représentants des cultes ; il fonctionne comme une instance de réflexion et de coordination ; son rôle est d’identifier les thèmes prioritaires pour le développement de la communauté et les projets prioritaires qui en découlent ; il est laïque et non politique ; il est le dépositaire du label […] accordé par [l’association] et responsable du respect de la Charte par la communauté devant [l’association], les autres partenaires et les voyageurs ; il est le propriétaire légal de l’unité d’hébergement construite dans le cadre du programme y compris du terrain sur lequel est bâti cette unité ; il est le responsable local de la bonne exécution des actions mises en œuvre au titre de ce programme : construction, formation, suivi technique et évaluation… ; il est le gestionnaire du fond de développement alimenté par les bénéfices de l’activité touristique, et à ce titre responsable devant la communauté et ses partenaires techniques et financiers, dont [l’association] et les voyageurs, de son bon usage au profit de projets d’intérêts collectifs ; son mode d’organisation et de fonctionnement relève de l’initiative et de la responsabilité de la communauté selon les pratiques du pays et son organisation administrative ; son existence, légalisée ou informelle, est une condition nécessaire pour faire acte de candidature au programme ».
12 La deuxième composante est le comité de gestion de l’activité touristique « formé d’une équipe restreinte de personnes choisies par le conseil de développement pour leur probité, leur sagesse, leur autorité morale, leur sens du bien public, leurs compétences et leur bonne compréhension des principes du projet […] ; responsable devant le conseil de développement et la communauté de la bonne gestion de l’activité touristique dans le respect de la Charte, du bon entretien des installations touristiques (le campement et son équipement) et de la sécurité et du confort des voyageurs ».
13 Enfin, la troisième composante est la cheville ouvrière du projet, à savoir l’équipe du personnel d’accueil et d’animation, placée sous la responsabilité d’un gérant ; « ces personnes doivent être recrutées par le comité de gestion avec l’aval du conseil de développement sur les critères suivants : volontariat, compétence pour les fonctions exercées, disponibilité, aptitude à l’accueil et aux échanges (bonne maîtrise de la langue officielle), représentativité maximale souhaitée de toutes les lignées et quartiers de la communauté »
14 (DossRéf, 2009, 14).
15 Dès le départ, le modèle a été créé en vue de sa reproduction internationale : « conçu pour être un modèle universel, adaptable à différents contextes culturels, le concept a vocation à s’internationaliser » (ProAc, 2005, 1) à la fois pour des raisons mercatiques, comme l’illustre la volonté de créer « une chaîne solidaire de tourisme équitable et solidaire, dotée d’outils marketing performants pour en assurer la pérennité » (DossRéf, 2009, 6) afin de fidéliser les voyageurs en diversifiant les destinations, et pour des raisons d’équilibre économique pour l’association, celui-ci correspondant environ à une dizaine de villages partenaires.
16 Les communautés candidates sont nombreuses et l’association sélectionne ses futurs partenaires à partir d’« un processus rigoureux de sélection et de formation » établi et animé par l’association. Lorsque c’est possible, les premiers partenaires sont associés à cette procédure de sélection. Les candidats doivent non seulement faire preuve de motivation et adhérer aux principes de la Charte ; ils doivent aussi respecter un ensemble de critères « liés principalement à leur cohésion sociale, leur dynamique de développement, la qualité de leur patrimoine culturel et naturel, ainsi que des critères techniques de nombre d’habitants, d’accessibilité, de services socio-éducatifs et de santé à proximité » (ProAc, 2005, 7). Plus précisément, la communauté d’accueil, pour pouvoir devenir partenaire d’ATC et s’en prévaloir, doit répondre aux critères suivants : « être présentée par une organisation de développement reconnue par l’association et travaillant avec cette communauté ; avoir pris connaissance des documents de référence […] et s’engager à en respecter les principes et les règles ; faire preuve de la qualité de son organisation sociale, culturelle et économique et de son dynamisme en matière de développement local […] ; faire preuve de sa bonne entente en interne et vis-à-vis des autres communautés de son terroir ; faire preuve de son aptitude à pouvoir gérer convenablement cette activité touristique et à garantir la sécurité des voyageurs ; bénéficier d’un environnement [doté de…] voies d’accès, moyens de communication, approvisionnement en produits de qualité (eau, alimentation), services de santé accessibles, absences de troubles (brigandage, etc.) ; bénéficier d’un environnement naturel, social et culturel de qualité pouvant être valorisé pour assurer l’animation et les activités des voyageurs durant leurs séjours ; disposer d’un minimum de personnes motivées et ayant un niveau de formation suffisant pour gérer cette activité et suivre des formations » (DossRéf, 2009, 23-24).
17 La mise en œuvre de ce processus de sélection au Bénin, entre décembre 2004 et mars 2005, a conduit l’association, en partenariat avec une ONG béninoise de développement, à retenir deux villages sur les six initialement présélectionnés. L’un situé en bord de mer, sur le territoire de la commune de Ouidah, comprend 1 700 habitants (village 1), le second, à 100 km à l’intérieur des terres, proche d’Abomey, réunit 3 000 habitants (village 2). Sur la période 2005-2008, les communautés villageoises béninoises ont accueilli 389 voyageurs pour 77 séjours et 4 886 journées voyageurs.
2. COMMENT L’ILLUSION CULTURALISTE TEND À ORIENTER LE CHOIX D’ATC POUR UN TOURISME SOLIDAIRE DE COMMUNAUTÉS VILLAGEOISES
18 Croire qu’un fonctionnement démocratique et participatif fait nécessairement partie des cultures traditionnelles est une méprise courante dans le monde du développement. Il est possible de la rapprocher de la croyance selon laquelle une communauté constitue nécessairement un ensemble harmonieux échappant au conflit. Pourtant, le concept de participation reste une référence centrale des conceptions du développement durable, comme des discours des acteurs et des institutions sur le tourisme. D’après la définition d’août 2004 du développement durable du tourisme proposée par l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), reprise sur de nombreux sites Internet, dont celui du collectif français des associations de tourisme équitable et solidaire (ATES) : « le développement durable du tourisme requiert la participation, en connaissance de cause, de tous les acteurs concernés, ainsi qu'une forte direction politique pour assurer une large participation et l'existence d'un consensus ». L’article 5 du code mondial d’éthique du tourisme de l’OMT précise que « les populations locales sont associées aux activités touristiques et participent équitablement aux bénéfices économiques, sociaux et culturels qu’elles génèrent, et spécialement aux créations d’emplois directes et indirectes qui en résultent », tandis que le premier des dix principes autour desquels se retrouvent les membres de l’ATES place les populations locales « au cœur du processus d’accueil », l’opérateur devant organiser « ses séjours en partenariat avec elles ».
19 Le cas du tourisme est spécifique parce que la communauté et ses valeurs traditionnelles sont considérées comme une ressource touristique par les opérateurs de voyage et, dans ce cas, la satisfaction des touristes dépend de l’attitude des membres de la communauté, d’où l’importance économique que cette dernière revêt. Et les valeurs traditionnelles qui sont vues par certains développeurs comme un obstacle à la modernisation nécessaire au développement, deviennent ici une ressource qu’il faut préserver, en particulier pour sa valeur économique [7], avec d’autant plus de risques pour les animateurs de projets touristiques de s’installer dans l’illusion participative en idéalisant ces valeurs et la communauté qui les porte.
20 Richards et Hall (2003, 4-5, traduction des auteurs) observent que « la reconnaissance que les communautés pouvaient avoir quelque influence sur le développement du tourisme a généré, ces dernières années, un courant croissant de littérature sur le tourisme communautaire et le développement communautaire par le tourisme, […] la récente redécouverte des locaux et l’importance croissante de l’identité a placé les communautés au faîte des discussions sur le développement touristique. La communauté locale est devenue, pour beaucoup, le cadre approprié pour le développement du tourisme durable. » Et ils ajoutent que dans le cas du tourisme, la communauté reste le plus souvent envisagée comme un ensemble relativement homogène, objet de peu de conflits internes. De fait, la majorité des auteurs présentent la participation communautaire comme l’outil qui va résoudre la plupart des problèmes engendrés par le tourisme dans les pays en développement et plus précisément permettre d’éviter que les projets touristiques résultent d’accords entre investisseurs étrangers et élite nationale sans que les populations ne soient consultées ou ne participent à leur élaboration. Pourtant, cette vision idéale ne se met en œuvre qu’avec grande difficulté dans la réalité (Tosun, 2000).
21 Le plus souvent, les auteurs évoquent deux niveaux de participation à propos du tourisme : le premier correspond à un intéressement aux bénéfices de l’activité touristique, alors que le second va jusqu’à une participation au processus de décision. Si la plupart des auteurs considèrent que seul un partage du pouvoir de décision peut permettre des bénéfices pour les populations locales et favoriser le respect de leurs valeurs traditionnelles, il en est quelques-uns à s’opposer à cette idée. Par exemple, Li (2005) avance que cet idéal est avant tout occidental et ne se rencontre que rarement dans les pays en développement. Pour cet auteur, il est plus utile aux populations locales d’être employées dans un projet ou de s’impliquer dans des petites entreprises que d’être associées à la prise de décision. Il étudie le cas d’une réserve de biosphère en Chine et montre que malgré un investissement minimal dans les processus de planification et une faible participation aux décisions, la quasi-totalité des habitants du territoire de la réserve sont satisfaits des bénéfices qu’ils reçoivent du tourisme, activité qui a pris la place de leurs activités traditionnelles de subsistance (chasse et agriculture).
22 Nous avons vu que l’association ATC a développé une vision très précise de ce qu’elle souhaite mettre en œuvre. Cependant, l’application sur le terrain rencontre quelques difficultés qu’il nous parait pertinent d’analyser au regard de la problématique de l’illusion participative.
23 Au sein de l’illusion participative, la première erreur est le recours à la fiction d’une communauté harmonieuse et démocratique. La référence récurrente au concept de communauté dans l’ensemble des documents produits par l’association pourrait laisser entendre que l’association soit victime de cette illusion. C’est que son modèle repose complètement sur l’existence d’une totalité désignée par le terme de communauté : l’association veut proposer « un tourisme géré de manière communautaire et non lucrative » (ProAc, 2005, 1) dont le principe de base est que « l’accueil des voyageurs doit reposer sur une organisation et une mobilisation collective de toute la communauté » afin « d’être parfaitement maîtrisé et servir efficacement les intérêts de la communauté ». Ce tourisme « engage toute la communauté : les voyageurs sont invités au nom du village et non pas par une personne, une famille ou un groupement particulier ; ces voyageurs espèrent que leurs séjours génèrent des retombées bénéfiques au profit de toute la communauté » (DossRéf, 2009, 5). La première condition à remplir est l’existence d’une communauté. En outre, il faut que celle-ci soit idéale, comme le montre la liste de conditions à remplir présentée dans la première partie : la communauté doit être socialement, culturellement et économiquement organisée, autonome et équilibrée (épargnée par les troubles de type brigandage), composée de suffisamment de personnes motivées et compétentes ; que ses membres vivent en bonne entente entre eux et avec les communautés voisines, et, de plus, soient capables de gérer “convenablement” l’activité touristique… Le projet suppose donc l’existence d’une communauté vue comme un ensemble dont l’engagement doit être total et le fonctionnement transparent et démocratique car les trois instances permettant au projet de fonctionner doivent être représentatives de la totalité de la communauté et désignées démocratiquement par celle-ci afin de contribuer « à la construction d’organisations de développement modernes et efficaces, inscrites dans l’évolution démocratique du pays » (DossRéf, 2009, 14). Il y a bien là une idéalisation de la communauté et de son fonctionnement que l’on retrouve à la base du projet de l’association et de ses choix d’opter à la fois vers un tourisme communautaire comme vers une conception communautaire du développement. Premier constat, d’après le rapport final rédigé par un consultant indépendant suite à la mise en œuvre d’un processus d’auto-évaluation réalisé dans les villages en 2009, « beaucoup de personnes ignorent toujours les finalités [du projet touristique] ». Les choix et la vision de l’association se heurtent dans leur traduction effective à des expressions de désaccord de partenaires villageois, principalement à propos de deux points de focalisation générateurs de conflits. Le premier est un sujet de discussion récurrent entre l’association ATC et ses partenaires à propos de la dimension communautaire du développement portée par l’association. Laquelle refusant que son action ait pour conséquence d’enrichir quelques familles privilégiées oblige les communautés à s’organiser collectivement pour gérer l’activité touristique et surtout, point de cristallisation de la contestation chez certains partenaires, refuse le don personnel, au motif qu’il menace « la cohésion sociale des communautés villageoises », comme l’indique la Charte.
24 Paradoxalement, plus que par les partenaires africains, c’est par une communauté indigène d’Équateur particulièrement soudée que la dimension collective de l’activité touristique menée par ATC est le plus remise en cause, alors même que dans ce pays, les indigènes revendiquent justement un fonctionnement communautaire. En septembre 2007, lors de la mission d’identification de nouveaux partenaires en Équateur, les représentants de cette communauté candidate s’étaient exprimés en faveur d’un hébergement et d’une restauration en famille. Cette mission avait renforcé la préférence de l’association pour un hébergement communautaire à la fois pour des raisons de justice sociale et de qualité de la rencontre touristique [8]. Les représentants de la communauté s’étaient alors rangés aux raisons de l’association sans qu’il fut possible de savoir avec certitude si leur acceptation du principe d’un hébergement communautaire avait pour cause leur volonté d’être partenaire de l’association (c’était une condition à leur entrée dans le réseau des partenaires) ou le fait d’avoir été convaincus par les arguments avancés. En 2009, après trois séjours organisés en logeant les touristes provisoirement au sein de familles (en attendant la construction d’un hébergement collectif), la communauté exprime à nouveau sa préférence pour l’hébergement en famille au prétexte de l’investissement des quelques familles concernées en argent et en compétence. En ce qui concerne la question du don, la Charte l’évoque dans deux engagements. Le premier est un engagement des villages à organiser la sensibilisation des villageois à ne pas demander de dons individuels « pour préserver la cohésion sociale des communautés villageoises ». Le second est un engagement des voyageurs à mettre en œuvre « une solidarité organisée et constructive » pour « permettre aux communautés d’accueil de construire leur autonomie pour assurer par eux-mêmes leur développement grâce aux fruits de leur travail collectif et leur ouverture sur l’extérieur ». Il est écrit ensuite : « le don matériel ou financier, surtout s’il est individuel ou prémédité, est totalement déplacé : il dénature la valeur même de l’échange, contrevient à l’esprit de la démarche, crée des dépendances et des besoins, suscite des jalousies et la mendicité ou provoque la démobilisation. En conséquence, le voyageur s’abstient de tout cadeau tout au long de son séjour. »
25 Ces deux engagements gênent tout autant les villageois qui ne peuvent pas solliciter librement les touristes pour obtenir un don matériel ou financier à titre personnel que les touristes qui ne peuvent pas satisfaire ouvertement leur désir d’aider par des dons. Dans cette relation triangulaire, en s’opposant aux désirs des villageois et aux voyageurs, l’association tient le mauvais rôle et cristallise les critiques. Certains villageois accusent l’association de soutenir des projets collectifs alors qu’ils préféreraient des projets individuels. L’incompréhension qui en découle est alors relayée auprès de voyageurs d’autant plus réceptifs à abonder dans ce sens qu’ils ressentent pour certains (la majorité ?) le besoin de donner. Tous les acteurs concernés savent que cette règle est enfreinte à certaines occasions, pendant, comme après les séjours. Le fait que ce point soit toujours l’objet de débat après plusieurs années marque de toute évidence l’échec du travail de sensibilisation menée par ATC auprès des partenaires villageois comme des voyageurs. Plutôt qu’un tel travail, l’attention aux différents sens donnés à cette règle par les partenaires d’ATC et la possibilité de négocier ou de redéfinir celle-ci ne serait-elle pas plus pertinente ? [9]
26 L’autre point de focalisation générateur de conflit concerne la question de la structuration institutionnelle portée par ATC et se constate, notamment, dans les deux villages béninois. Au Bénin, le processus de décentralisation engagé en 1990 a eu pour conséquence de donner un rôle accru aux communes dont les conseillers sont élus au suffrage universel et dans les institutions desquelles ni la société civile ni les notabilités coutumières ne sont représentées. Le territoire national est découpé en douze départements, 77 communes, elles-mêmes découpées en arrondissements, quartiers et, enfin, villages, puis hameaux. Les arrondissements n’ont de pouvoir que par délégation du maire auprès des chefs d’arrondissements, alors que les conseils de village et de quartiers n’ont qu’un statut consultatif. Les instances créées dans les deux villages suite aux préconisations d’ATC n’ont pas d’autres responsabilités que celles qui découlent de l’activité touristique.
27 Le village 1 est relativement étendu et comprends huit hameaux qui semblent peu soudés entre eux, en partie du fait de la position du village entre mer et lagune qui rend la circulation entre les quartiers difficile. Le hameau central (où se trouve le campement touristique) est fréquemment accusé par les autres hameaux de concentrer tous les pouvoirs et de bénéficier en priorité des projets. Les habitants de ces derniers préfèrent, par conséquent, ne pas s’investir dans un projet qui ne devrait pas leur profiter. Dès la fin du premier séjour test, les membres du conseil villageois se sont tous retirés, à part le président et quelques sages. Malgré une séance de sensibilisation de l’ensemble des hameaux menée par ATC en collaboration avec une ONG locale, les autres hameaux ont du mal à se sentir concernés. L’ONG locale, après avoir pris en charge la maîtrise d’œuvre de la construction du campement touristique pour laquelle elle a mobilisé des fonds auprès de différents bailleurs, a souhaité s’investir dans la commercialisation des séjours dans le campement pour lequel elle nourrissait de grandes ambitions commerciales. Lorsqu’elle a organisé l’élection d’un nouveau comité de gestion et d’une nouvelle équipe d’accueil sans en informer le conseil de développement, ATC a décidé de suspendre le village du réseau et d’en stopper la commercialisation [10], arguant (a) l’absence de relations claires entre l’ONG locale et le village, (b) l’insuffisante représentativité des différents hameaux dans la composition des instances impliquées dans le projet, et (c) leur insuffisante implication dans le projet, (d) les relations conflictuelles entre le salarié local d’ATC et le village, (e) les tensions internes au village, (f) la baisse de la satisfaction des voyageurs et (g) la mauvaise volonté de ce village à échanger avec l’autre village. À l’appel de l’association, la commune s’est investie dans la résolution du conflit en organisant un renouvellement des instances dirigeantes respectant l’exigence de représentativité formulée par ATC. Les nouvelles instances sont composées de personnes qui ne se connaissent pas, ce qui rend difficile la communication entre elles et le travail en commun. Pour y remédier, le salarié local a entrepris de délocaliser certaines activités touristiques dans les autres hameaux afin de les mobiliser et il prévoit de construire une petite digue afin de faciliter les déplacements des membres d’un hameau éloigné vers le centre.
28 Dans le village 2, il existe des conflits à la fois entre les deux instances chargées du projet touristique (le comité villageois et le comité de gestion) et des conflits internes à celles-ci à propos de leurs compétences respectives et au sujet de l’indemnisation du personnel, critiquée par certains. Le président du comité de gestion réclame une rémunération de la part de l’association française. Contesté avec son équipe par certains villageois qui souhaiteraient occuper à leur tour les postes, il s’oppose à toute convocation d’une assemblée générale destinée à élire de nouvelles instances, comme le réclame l’association ATC, au prétexte qu’il n’y a pas suffisamment d’intellectuels dans le village pour renouveler les instances dirigeantes. Il affirme sa légitimité en raison de son antériorité et de son investissement personnel dans le projet.
29 Finalement, on constate que dans ces deux villages, loin d’avoir un effet de cohésion sociale, la mise en œuvre du projet touristique est vite devenue un enjeu politique et économique, provoquant des luttes ouvertes de pouvoir et exacerbant les conflits existants, plaçant l’association française dans l’obligation de faire appel et de s’en remettre aux autorités locales pour résoudre les situations de blocages.
30 L’association se réclame explicitement d’une démarche participative : le programme est « basé sur le partenariat, le compagnonnage, le développement participatif, et un processus technique rigoureux » (DossRéf, 2009, 7). Pour elle, la participation est autant un moyen que l’un des sous-objectifs fixés au programme : « Renforcer la vie citoyenne et la démocratie participative en favorisant la participation du plus grand nombre et non un groupe d’individus à la gestion du projet et de ses retombées » (DossRéf, 2009, 12). À travers la participation, c’est l’autonomie qui est visée. Et de fait, « à chaque étape d’avancement du programme, les acteurs locaux ont été associés dans le cadre de forums au processus de réflexion et d’élaboration du cadre de référence du programme » (ProAc, 2005, 9). Les résultats sont considérés par l’association comme positifs : « le projet contribue au déclenchement, ou au renforcement, d’un processus de réflexion participative sur le développement et la consolidation des mouvements associatifs dans les villages à travers les actions de formation, l’accompagnement des villages dans leur organisation institutionnelle et la participation de l’ensemble du village autour du projet… » (ProAc, 2005, 21). Pourtant, cette expérience montre toute la difficulté du projet participatif lorsque la complexité sociale des communautés partenaires est méconnue et son importance négligée. C’est que l’association extérieure est le plus souvent complètement démunie face à un conflit dont les raisons peuvent être hors de sa portée culturelle, avec comme solution la plus évidente le repli sur sa logique, son schéma qu’elle tente alors d’imposer au partenaire en désaccord, contredisant dans ses actes, l’objectif initial de participation.
CONCLUSION
31 Dans le cas d’ATC, le fait que l’objectif, c'est-à-dire le développement, même communautaire, soit un concept étranger, que le cadre et le programme soient conçus avant même le démarrage opérationnel du programme, que l’initiative soit celle d’ATC et non pas des communautés limite inévitablement l’implication des partenaires, malgré les sollicitations d’ATC, les campagnes de sensibilisation ou les formations destinées à l’appropriation des techniques propres au programme. Au moment de ce travail d’analyse mené en 2009, l’autonomie des partenaires villageois n’est admise par ATC qu’à l’intérieur du cadre d’action qu’elle a dessiné initialement et qu’elle considère comme étant le seul valable. Ce qui amène à se demander si, en définitive, l’enjeu ne serait pas d’étendre la question de la participation à ce qui en est habituellement écarté : la négociation des objectifs et du cadre d’action, la capacité à initier ce dernier en lui attribuant une finalité ?
32 L’expérience de tourisme communautaire menée par ATC, notamment dans les deux communautés béninoises, montre bien comment l’absence de prise en compte de la complexité sociale des villages concernés limite les dynamiques de compromis entre acteurs en situation de désaccord ou de conflit, amenant à osciller entre deux configurations : soit un consensus apparent qui repose sur des malentendus (non explicités ou que l’on préfère ignorer – en faisant comme si on parlait de la même chose), soit, lorsque ces derniers se révèlent ou qu’on ne peut plus faire comme si on les ignorait, une situation de crispation des acteurs empêchant toute construction d’accord sur la base d’une négociation conflictuelle [11].
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
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- TOSUN C. (2000) Limits to community participation in the tourism development process in developing countries, Tourism Management, n° 21, 613-633.
Notes
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[1]
Docteur en sociologie, Université Perpignan Via Domitia. girard@univ-perp.fr
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[2]
Docteur en sciences économiques, Université Perpignan Via Domitia. bscheou@univ-perp.fr
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[3]
Dans la perspective méthodologique ouverte par les travaux de Olivier de Sardan (2007, 1995) et Bierschenk, Chauveau et Olivier de Sardan (2000).
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[4]
Il nous semble important de ne pas citer l’association car l’analyse présentée, effectuée en 2009, résulte en quelque sorte d’une “photographie” prise à cette date, qui ne saurait être associée de manière permanente à ATC. D’ailleurs, le renouvellement de ses dirigeants, intervenu depuis, a eu pour conséquence de nombreux changements dans la stratégie mise en œuvre. Pour autant, nous considérons que les constats effectués et les enseignements que nous en retirons ont, eux, une portée plus large, dans le sens où nombre de projets actuels et futurs peuvent leur correspondre, au moins en partie.
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[5]
Nous utiliserons principalement deux documents internes de l’association, tous deux rédigés par son fondateur. Le premier est un dossier de référence dont la dernière version date de septembre 2009, nous le désignerons par (DossRéf, 2009), il synthétise l’ensemble de la méthodologie du programme mis en œuvre par l’association. Le second correspond au programme d’action de l’association pour la période 2005-2007, programme déposé pour un financement qu’elle a obtenu avec un décalage d’environ deux ans, nous nous y référerons par (ProAc, 2005). Nous utiliserons aussi la brochure promotionnelle de septembre 2009, identifiée par la référence (ProgSej, 2009).
-
[6]
Une charte a été élaborée en mai 2002 par l’association et les représentants de ses trois villages partenaires à l’époque. Cette charte précise les engagements des villages, de l’association et des voyageurs. Les nouveaux villages partenaires devront signer et respecter ces engagements.
-
[7]
Le fait d’attribuer une valeur économique à la tradition ouvre la porte à l’exploitation économique de celle-ci et introduit un nouveau paramètre qui rend plus complexe la position des membres des communautés, lesquels ne sont plus simplement partagés entre valeurs traditionnelles et modernité mais entre tradition “authentique”, valeurs traditionnelles monnayables et modernité.
-
[8]
Au niveau touristique, l’expérience avait montré que les obligations générées par l’accueil en famille, en pesant sur les membres de celle-ci comme sur l’hôte accueilli, pouvait nuire à la rencontre et qu’il était préférable d’organiser les moments d’échanges en fonction des temps de liberté des familles.
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[9]
Notons qu'ATC a organisé un forum réunissant ses partenaires à l’occasion des dix ans de l’association avec pour objectif de tirer un bilan collectif du projet, ce qui pouvait justement être un espace approprié pour un tel processus de négociation. Cependant, sans doute, le souci de trop cadrer méthodologiquement le forum et la volonté de l'utiliser également pour promouvoir l’action de l’association auprès de ses partenaires institutionnels n’ont pas permis une parole suffisamment libre en public pour qu'il soit possible de discuter, et même d'évoquer, les différents points de tension existants et de progresser à leur égard.
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[10]
Cette suspension, intervenue au milieu de l’année 2008, ne concernait pas les séjours déjà programmés jusqu’à la fin de l’année 2008 et n’a donc pas eu d’effets sur la fréquentation et les revenus en découlant, nécessaires tant au village qu’à l’association, la suspension ayant été levée avant les séjours de 2009.
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[11]
Dans ce cas, les conflits conduisent à des blocages au lieu de générer des “dynamiques de compromis”, pour reprendre le concept proposé par Boltanski et Thévenot (1991).