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mercredi 17 juillet 2024

Antifascisme à l'anglaise

 

La bande à Mosley bousculée en 1962
Qu'on le veuille ou non, l'avenir étant ce qu'il est, nous pensons qu'il est bon de rappeler deux ou trois moments de l'histoire qui peuvent être inspirants pour les temps à venir. 
Même si l'histoire ne repasse pas les plats, comme disait l'autre.
Contrairement à ce que présente certaine série à succès, le fasciste britannique Oswald Mosley (fondateur de la BUF, British Union of Fascists) n'avait rien d'un génie du mal machiavélique. 

Ce Jacques Doriot raté (tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir la Wehrmacht à domicile) baronnet de son état, était passé des rangs conservateurs aux travaillistes avant de tenter sa chance en fondant un parti fasciste britannique en 1932 suite à des vacances romaines. 
Mêlant un semblant de programme économique keynésien à un décorum impeccable (chemises noires paramilitaires) ainsi qu'à une haine des rouges, des Juifs, des Irlandais, des immigrés caribéens et de tout ce qui n'est pas Anglais pur jus fantasmé, ces brutes atteignirent 50 000 adhérents en 1934 et multiplièrent meetings et parades de rue.    
Évidemment, dans un pays où le sentiment de classe est aussi exacerbé que le Royaume Uni, ces joyeux happenings ne se déroulèrent pas sans heurts .
Mais l'événement d'avant-guerre qui resta dans toutes les mémoires fut celui du 4 octobre 1936, demeuré "la bataille de Cable street". 


Ce jour-là, les matamores d'Oswald n'avaient trouvé rien de plus fumeux que d'effectuer une marche dans l'East end, quartier prolétaire à forte population juive.
Les 5 000 chemises noires se retrouvèrent donc face à un ensemble de communistes, d'anarchistes, de socialistes d'organisations juives et nationalistes irlandaises de gauche regroupant entre 100 000 et 300 000 antifascistes décidés à en découdre. T'en veux du Front pop' fait à la base ? 
Pour arbitrer le match, la police métropolitaine avait envoyé entre 6000 et 10 000 flics, dont la cavalerie.
Logiquement, les flics chargèrent les antifascistes qui se chargèrent de renvoyer les sinistres corbeaux jusqu'à la Tamise. On parla alors de "deuxième guerre civile". 
Ce fut la dernière marche jamais organisée par le BUF.
Par ailleurs, le gouvernement de sa Majesté se hâta de passer une loi interdisant les défilés politiques en uniforme (un peu a l'instar de la dissolution des ligues en France).
Cette réaction populaire fut célébrée dans de nombreuses chansons fredonnées dans les foyers ouvriers. Une des plus fameuses fut Ghost of Cable street, ici exécutée par le sympathique groupe folk rock The men They couln't hang (leur nom méritant, à lui seul un autre article).
La version ici proposée inclue un résumé de l'affaire sur des images d'époque.


À partir de juin 1940, Mosley et quelques milliers de ses sbires, devenus pacifistes forcenés, échappèrent aux combats en cours en passant leurs années de guerre en taule. 
Le lamentable führer remonta un parti fasciste après-guerre, l'UM qui évoluera en NF (National front) qui aura un succès certain à partir des crises des années 1960 et 1970.
Le courageux chef avait d'ailleurs préféré s'exiler en France, dans l'Essonne, pour diriger tout ça à prudente distance.  
En ce qui concerne l'après-guerre, rendons ici hommage à un groupe assez méconnu The 43 Group. Groupe de combat semi-clandestin monté par des vétérans majoritairement Juifs (parachutistes, marins, commandos, etc.) antifascistes afin d'infiltrer, de s'opposer et de détruire toute résurgence fasciste en Grande-Bretagne.
Nommés ainsi d'après l'adresse du club sportif d'Hampstead, cette organisation de combat compta plus de 1000 membres à Londres, Manchester, Birmingham et Newcastle.
Ils publièrent aussi un journal dénonçant tant le fascisme à l'international que les politiques racistes des États Unis ou de l'Afrique du Sud.
Considérant le danger immédiat écarté, ce groupe s'auto-dissout en 1950.
Avant de faire place au 62 Group en 1962 (photo ci-dessus) mais c'est une autre histoire. 
Allez, tirez-en les leçons qui s'imposent et quittons-nous sur une dernière ballade au sujet de Cable street : The balade of Johnny Logstaff par les Young'uns

vendredi 28 juin 2024

Vers la guerre civile ?

 

Barcelone, juillet 1936 (A. Centelles)

Je n'avais jusqu'alors jamais remis l'Espagne en question. J'y avais accepté que, bien gras et bien riche, le gros bonnet contemplât tout d'un oeil vitreux au fond de son club alors qu'au marché des hommes se battaient pour quelques déchets, que d'aimables vierges de la haute vinssent à l'église en carrosse alors que des mendiantes accouchaient dans les coins des portes.
Naïf et dépourvu de sens critique, j'avais cru que les uns et les autres faisaient tout simplement partie du tableau et ne m'étais jamais posé la question de savoir si c'était juste ou injuste.
C'est sur le pont de Séville que j'eus pour la première fois conscience que le grabuge n'allait pas tarder. Je m'y étais arrêté vers minuit pour regarder le fleuve lorsqu'un jeune marin s'approcha de moi et, m'ayant salué d'un "Salut Johnny!" me demanda une cigarette. Crachant ce qu'il disait comme si ça lui faisait mal à la langue, il parlait l'anglais qu'il avait appris à bord d'un navire charbonnier de Cardiff.

- J'sais pas qui t'es, fit-il, mais si t'as envie d'voir du sang, t'as qu'à rester dans le coin... va y en avoir plein. 

Laurie Lee Un beau matin d'été



lundi 25 mars 2024

Un an déjà !

 


Communiqué n°7 : Un an après

Le 25 mars à Sainte-Soline ne sera jamais un anniversaire que l’on célèbre. Loin d’une victoire politique, cette date rappelle plutôt le carnage que l’Etat français a perpétré à l’encontre de celles et ceux qui avaient fait le choix de lutter. 
 
Mais certains récents événements nous ont permis de nous réjouir et de fêter ça ensemble. Le S, après un échec d’opération due à une infection en octobre dernier, a été de nouveau opéré. L’objectif de l’opération (cranioplastie) était de reconstituer la boite crânienne percutée par la grenade.
 
Tout s’est bien déroulé et le S a de nouveau un crâne opérationnel ! C’est une étape-clé dans son processus de reconstruction qui a été franchie. Il continue à récupérer chaque jour des aptitudes, au prix d’efforts de rééducation importants. De lourdes séquelles persistent, mais sa détermination et la solidarité qui la nourrit nous renforce dans ce qu’on a défendu depuis le début : le refus de s’écraser. Preuve s’il en fallait qu’il ne faut jamais rien lâcher, quelle que soit la force des puissants. En être ici un an après la tentative de meurtre, ça donne l’impression de sortir vainqueur d’une défaite !
    
À l’heure des bilans, que tirer de Sainte-Soline ? La manifestation du 25 mars 2023 a été l’occasion pour nombre d’entre nous de participer à un élan collectif puissant autour du refus en acte de céder, ne serait-ce qu’un pouce de terrain, aux intérêts capitalistes, ici contre un projet d’accaparement de l’eau au profit d’une industrie agraire faiseuse de cancers, de pauvres et de sécheresses. Tandis que certaines fractions politiques ont fait de la lutte contre les grands projets un programme à long terme pour la constitution d’un camp social-démocrate que nous gerbons, nous y avons participé principalement pour ce que ce moment représentait : une reprise d’initiative en faveur de la force collective. 
 
En effet, fort du succès de la première manifestation, le deuxième acte de Sainte-Soline avait la particularité de faire écho à ce qu’il se passait dans la rue alors. Le mouvement contre la réforme des retraites avait connu un regain d’intensité après le 49.3 et les manifestations de rue, inondées de gaz lacrymogènes, s’échappaient peu à peu du nuage soporifique que les directions syndicales avaient installé depuis le mois de janvier. 
Sainte-Soline s’est transformé en enjeu symbolique et un symbole se défend souvent au canon. L’Etat ne voulait pas perdre la bassine, parce qu’il ne voulait pas perdre la face. S’en est suivie la démonstration d’un corps militaire surarmé, qui avait pour instruction de mutiler les corps et les esprits, dans un affrontement asymétrique, en rase campagne, depuis une position en hauteur. Notre camarade a échappé à la mort grâce à la détermination de celles et ceux qui l’ont protégé et soigné, sous le regard goguenard des militaires. Nous n’oublierons pas.
 
Depuis mars 2023, rien n’a cessé. Les démonstrations de force se sont succédé. Tout est symbole. L’Etat impose la terreur partout où il passe et convoque le pire pour nous convaincre de lui laisser le champ libre. Nous ne pourrons pas ici énumérer toutes les personnes, dans les cités ouvrières principalement, à qui la police a enlevé la vie depuis mars 2023. Les révoltes après l’assassinat à bout portant de Nahel ont reçu comme réponse immédiate la puissance de feu des équipes tactiques de la flicaille. Au lendemain des assauts des jeunes prolétaires contre les blindés et les fusils à pompe, l’Etat n’avait qu’un mot à la bouche : la discipline contre les prolétaires, jeunes et moins jeunes. Il veut une population aux ordres, pour que la classe se tienne sage. Il ne parle que de guerre prochaine et de sécurité, à grand renfort de coups de communication patriotiques, de financement du SNU et de répression tous azimuts. À entendre ses représentants, échapper au destin funèbre dont nous sommes témoins en plusieurs endroits du monde ne tiendrait qu’à notre soumission aux ordres.
 
Aujourd’hui, difficile de parler de la terreur d’Etat sans évoquer le massacre au grand jour des Palestiniens par l’Etat israélien. Pour rédiger ce communiqué, nous avons beaucoup discuté de la manière, et même de la pertinence, de lier dans un seul texte, un retour sur Sainte-Soline avec la colère sourde qui nous tient quand nous portons notre regard sur cet épisode et sur d’autres, constitutifs d’une situation internationale terrifiante. 
Il ne s’agit pas de comparer ces situations pour produire des équivalences, mais d’essayer de les lire à partir d’une même lunette, celle de la gestion prévisionnelle de notre répression. Le génocide des Palestiniens de Gaza signale aux prolétaires du monde entier ce que les gouvernants sont capables de faire, en chœur, pour le maintien de leur classe. C’est une blessure mondiale qui nous renvoie à notre impuissance.
 
Voilà le sale boulot des Etats : ils savent que, par leurs ravages et leurs carnages, ils produisent des traumatismes et s’en frottent les mains. Ils nous veulent saisis d’effroi et savent profiter de ce moment pour avancer encore, toujours plus, pour leur profit et vers notre écrasement. 
 
Mais ce monde n’est pas réductible à leurs calculs glacés. Nous qui sommes des milliards, nous les exploités, avons aussi un langage qui nous est propre et s’invente au gré des luttes. Il parle de solidarité, de force collective et de victoires, y compris dans les moments les plus sombres de leur Histoire comme aujourd’hui. Il permet aussi de désigner un horizon : celui d’une révolution mondiale, seule visée suffisamment ambitieuse pour gagner la puissance de libération nécessaire à la mise en PLS de ce monde de merde !
 
On ne lâchera pas l’affaire. 
 
Les camarades du S
 
PS : 
Après les épreuves traversées, nous souhaitons produire un bilan des Camarades du S pour paver le chemin de la résistance aux répressions qui jalonneront nos luttes. Pour y parvenir, nous serions intéressés par des retours critiques de la part de ceux et celles qui ont suivi et participé, de près ou de loin, à cette initiative. 
Vous pouvez envoyer tout témoignage, texte, réflexion ou analyse en ce sens à l’adresse      « s.informations@proton.me ».


dimanche 4 février 2024

Wayne Kramer (1948-2024)

 

J'ai passé cinquante ans de ma vie à jouer la musique du MC5. Quand j'ai commencé, je n'avais même pas mon permis de conduire. Mais j'avais une guitare et des potes qui voyaient le monde comme moi. On se retrouvait dans la cave de ma baraque à Detroit pour jouer. On a créé cette musique ensemble.
La musique du MC5 est ce que j'ai fait de plus mémorable. L'album Kick out the jam à tellement compté pour moi et a continué à compter énormément à travers les décennies et continents. 
Alors, bienvenue gens du monde entier, de tout âge, couleur ou genre dans la musique.
Wayne Krambs aka Kramer
 
 


  

 "D'un point de vue esthétique, nous avons connu un énorme succès. D'un point de vue économique... il n'y a pas eu de succès. Il s'agissait de la musique du futur et malheureusement, le groupe n'avait pas de futur."

  



mardi 9 janvier 2024

Gesundheit über alles !

 


En guise de billet tardif de début d'année, on aurait pu faire un constat désabusé du monde tel qu'il ne va pas.
Ce ne sont pas les sujets qui auraient manqué, des colossaux massacres à Gaza que certains prolongent sous prétexte d'aide humanitaire (remember Sarajevo ?), d'une guerre où l'Occident est prêt à combattre l'impérialisme le plus ignoble jusqu'au dernier Ukrainien à condition que ça ne lui coûte pas trop cher, d'une loi abjecte passée par un gouvernement qui ne fait même plus semblant (on croit avoir touché le fond avant de constater qu'il n'y a pas de fond), de la multiplication de guignols atroces au service du capital devenant démocratiquement chefs d'État, etc. 
On aurait même pu trouver des raisons d'espérer lorsqu'une Kurde nommée Roya Heshmati donne une leçon de dignité à une bande de fascistes libidineux.
Mais non, on partage notre stupéfaction sur tout autre chose.
Ami des années 1990, vous vous souvenez de Rage against the machine (rebaptisés par les anti tech pyrénéens Ariège against the machine) ?
Mélange de heavy punk, de funk et d'un soupçon de hip hop, ces Californiens firent fureur chez les jeunes gens par un gauchisme parfois de bon aloi.
Ou comment faire un tube mondial sur une triste réalité : la flicaille flingue. 
 
 
Quelle ne fut pas notre surprise de découvrir où va se nicher le refrain "Fuck you! I won't do what you tell me". 
Il semble que le petit père Kim Jong-Un goutte assez ce succès de 1992.
Aussi, le voir joué par un grand orchestre, devant un parterre de zombis en uniforme avec un fond de scène à base de symboles phalliques ravageurs, nous a laissé entre la jubilation la plus infâme et la tristesse la plus légitime.
Il faut dire qu'à Pyongyang, on swingue méchamment. Normal, une fausse note et te voilà au violon vite fait. 
On en est resté tellement baba qu'on se demande encore s'il s'agit d'un génial détournement à base de montage serré ou si cette séquence a vraiment existé, auquel cas, on le répète, il n'y a vraiment plus de fond à toucher.
Nous livrons l'objet de notre perplexité à votre sagacité.


Notre cher Kaurismaki, qui avait offert à la population d'Helsinki un concert des Leningrad Cowboys accompagnés par les chœurs de l'Armée Rouge peut aller se rhabiller. 
Allez, que l'année vous soit tout de même moins pénible que la précédente.


dimanche 3 décembre 2023

Nguyen Tan Tai-Luc (1958-2023)


D'accord, il a eu des côtés très très peu sympathiques avec des fréquentations ambigües pour ne pas dire, plus. On peut pas passer l'éponge là-dessus.
N'empêche qu'avec la disparition de l'âme de La Souris Déglinguée, c'est une page du rock français qui se tourne et (encore) une partie de notre jeunesse qui se fait la malle.
Avec ce groupe de lycéens, créé en 1976, par Tai- Luc, Jean-Pierre, Hervé et Terkadec (harmonica), on a tenu le parfait mélange d'énergie punk et rockabilly, mâtiné d'une pincée de Oï chantant des chroniques sociales ras du trottoir. 
On tenait enfin des Clash de chez nous, à la sauce Kebra meets la bande à Kruel dotés une crédibilité en béton armé.

  

Et puis, c'est vrai, on en a eu un peu classe de devoir se cogner avec une bande de nazillons à quasiment chaque apparition du groupe. Marre aussi de paroles trop souvent confuses.
Restent de beaux moments et le plaisir des deux premières impeccables galettes : La Souris Déglinguée et Une cause à rallier.
Ce sont aussi eux qui prendront NTM en première partie à l'Olympia, marquant le passage de relais musical de l'époque.
Tai-Luc continuait à jouer (un album solo assez raté, juke-box, en 2007)
Il donnait également des cours à l'Inalco et avait un stand de bouquiniste sur les quais de Seine.
Que la terre te soit légère, gars.
Un rappel des débuts.

   



vendredi 28 juillet 2023

Jean-Patrick Manchette, le rock et l'imposture

 

 


Au théâtre, c'est avec une pièce rock que tu as fait tes débuts : Cache ta joie !
 
Ouiiiiii... on peut appeler ça une pièce rock. C'est Daniel Benoin de la Comédie de Saint-Étienne qui m'a demandé d'écrire une pièce qui devait intégrer un groupe de rock (Factory, ndr). Je suppose que c'est du hard rock. Je m'y perds un peu avec les dénominations qui ont surgi de toutes parts. (...)
Donc on m'a passé commande avec probablement l'idée que j'allais faire une pièce noire. Comme mes bouquins. Ce n'est pas du tout ce qui est venu. Sur le plan réaliste, ça appelait un texte sur les zonards. Or c'est un milieu que je ne connais pas. Je suis un écrivain presque quadragénaire, saperlotte. Ç'aurait été quasiment malsain, artificiel, faux. Infaisable en fait. J'ai donc écrit un truc sur la culture. Complètement irréaliste et burlesque. Sur la récupération d'un groupe de pauvres qui essaient de s'en sortir par le rock. Et qui, à la fin, effectivement s'en sortent, mais pratiquement morts, empaillés, momifiés. c'était assez curieux à écrire parce que je ne savais pas à l'avance comment l'équilibre allait se faire entre musique et texte. (...)
Finalement, c'était très intéressant de voir ces mecs, véritables zonards, en train de faire leur musique et tenir superbement tête au texte négatif écrit par un viel intellectuel de gauche.
 
Tu écris (...) une pièce rock, musique qui ne t'intéresse pas, n'est-on pas en droit, quelque part, de te qualifier de truqueur ?
 
Je ne crois pas qu'on puisse déduire de Cache ta joie ! que je m'intéresse au rock. C'est une pièce quasiment anti-rock, qui ne fonctionne bien justement  que parce que le rock, sur scène, discute avec le texte pour finalement l'emporter sur lui. Mais que je truque...oui.   

JP Manchette, interview de Serge Loupien dans Libération, 15 mars 1982. 
Derrière les lignes ennemies. Entretiens 1973-1993


 

En prime, une autre joyeuseté de la bande à Yves Matrat, tout droit sortis de Givors (69) à la fin des années 1970.

samedi 22 juillet 2023

Bassines ou cuvettes ?

 

Le lieutenant Morel en famille et en vacances

Voici l'histoire pas très banale du lieutenant des gardes mobiles Xavier Morel qui risqua sa peau le 25 avril dernier à Ste Soline.
Pris sous un feu roulant de cailloux, le malheureux officier invoqua très fort les mânes de son grand-oncle tombé en défendant l'Occident et la Banque d'Indochine dans la cuvette de Dien Bien Phu (1954). Non, l'histoire n'avait pas le droit de se répéter même en tragi-comédie !
Aussi le lieutenant ordonna à sa compagnie d'ouvrir le feu de toutes la puissance de ses cougars, LBD et autres grenades assourdissantes, offensives ou bean bags.
L'ennemi s'appelait-il Serge, Mickael, Alix ? Peu importe, pour cette fois l'occident (et la FNSEA) étaient sauvés.
Ce conte absurde pour illustrer, le dernier né des Nuclear Boogie (avec Bogmallow, Marc et Alex) vibrant hommage à la tradition St Cyrienne.
Sur ce bonnes vacances sous contrôle des CRS maîtres-nageurs.

mardi 9 mai 2023

Le seul juge supportable



Au cas où notre honorable lectorat en douterait, nous avons toujours eu des rapports exécrables, dans le meilleur des cas empreints de méfiance, avec l'institution judiciaire.  
Le seul magistrat qui trouve gâce à nos yeux est Finlandais. 
Hannu Juhani Nurmio, aka Tuomari Nurmio (juge Nurmio) alias Judge Bone est né à Helsinki en 1950 et doit son bizarre surnom à son doctorat en droit (thème de sa thèse "Abolition de la torture en droit international") dont il ne s'est jamais servi professionnellement. Par contre, il est un des auteurs compositeurs interprètes les plus respecté de son pays et ses premiers albums sont reconnus comme des classiques maniant un finnois poètique et populaire (enfin dixit les connaisseurs, parce que le finnois, pour notre part...)
Amoureux de blues, country, bluegrass et autres musiques du Diable, le gars se lance d'abord dans de la zizique en anglais avec les Dusty Ramblers. Nurmio a repris cette veine en devenant Judge Bean (en référence à Roy Bean, juge atrabilaire autoproclamé de Langtry) puis Judge Bone associé à Joe Hill, son batteur favori, Markku Hillilä de son vrai nom. Un troisième LP est prochainement attendu.
les voici dans Dry Bones

Nurmio est aussi membre d'un groupe de folk qui accompagne divers chanteurs de passage en Finlande et le gars apparaît avec le groupe de métal Korpliklaan.
Mais il reste avant tout apprécié pour ses chansons à la gloire des prolos et autres oiseaux de nuit. On se demande encore comment ça se fait qu'on ne l'ai pas vu apparaître dans un film de Kaurismäki, allez savoir...
Tonnin Stiflat, de 1999 variation poètique sur une errance de bars en bars avec une tonne de cafard est un très bel exemple de son talent. Allez, la cour vous refile un non-lieu mais n'y revenez plus.

lundi 27 mars 2023

Ils veulent nous tuer

 

Communiqué au sujet de S., camarade au pronostic vital engagé à la suite de la manifestation de Sainte-Soline

Samedi 26 mars à Sainte Soline, notre camarade S. a été atteint à la tête par une grenade explosive lors de la manifestation contre les bassines. Malgré son état d’urgence absolue, la préfecture a sciemment empêché les secours d’intervenir dans un premier temps et d’engager son transport dans une unité de soins adaptée dans un second temps. Il est actuellement en réanimation neurochirurgicale. Son pronostic vital est toujours engagé.

Le déferlement de violences que les manifestants ont subi a fait des centaines de blessés, avec plusieurs atteintes graves à l’intégrité physique comme l’annoncent les différents bilans disponibles. Les 30 000 manifestants étaient venus dans l’objectif de bloquer le chantier de la méga-bassine de Sainte-Soline, un projet d’accaparement de l’eau par une minorité au profit d’un modèle capitaliste qui n’a plus rien à défendre sinon la mort. La violence du bras armé de l’État démocratique en est la traduction la plus saillante.

Dans la séquence ouverte par le mouvement contre la réforme des retraites, la police mutile et tente d’assassiner pour empêcher le soul��vement, pour défendre la bourgeoisie et son monde. Rien n’entamera notre détermination à mettre fin à leur règne. Mardi 28 mars et les jours suivants, renforçons les grèves et les blocages, prenons les rues, pour S. et tous les blessés et les enfermés de nos mouvements.

Vive la révolution.

Des camarades de S.

PS : Si vous disposez d’informations concernant les circonstances des blessures infligées à S., contactez-nous à : s.informations@proton.me

Nous souhaitons que ce communiqué soit diffusé le plus massivement possible ...

(Dont acte)

 



vendredi 24 mars 2023

Sa majesté la foule

Ici, même les mémés aiment la castagne


De notre correspondant

Toulouse, 23 mars 2023, 6h30 du matin. Des barrages filtrants ou enflammés sont en place aux entrées Sud, Ouest, Nord (à l'est rien de nouveau). Mention spéciale au barrage enflammé sur le périphérique ouest qui provoqua le plus monstrueux embouteillage de l'année. 

L'intervention de la BAC sur la zone industrielle de Sesquières, au nord, a tout de même abouti sur une quinzaine d'arrestations. Ce qui est un peu cher payé. Ambiance...
Dans la région, les barrages sont en place à Auch, Montauban, Albi, Tarbes, Foix.....
 
16h30, la tête de la manifestation partie de St Cyprien à 15h (30 000 selon les flics, 100 000 selon la CGT) arrive en plein centre-ville à la place Jeanne d'Arc. 
Cette tête de cortège est formée de non syndiqués, reste de GJ, jeunes et vieux gens en noir et tout ce qui refuse de défiler derrière un SO en général.
Présence policière massive et les pelotons de la BAc viennent coller aux manifestants.
À l'entrée de la rue Denfert-Rochereau tombent première grenades destinées à diviser ce groupe de tête de la manif syndicale. C'est là que le miracle se produit : au lieu de se disperser sous les gaz, sa majesté la foule (King mob chez les Brits) réplique, s'enflamme, se bat, se défait pour se reformer derrière les poulets, se fluidifie, élève des barricades, chante, se marre, abat les pauvres vitrines des banques, agences immobilières et d'intérim. Pendant trois heures, les boulevards toulousains seront un incessant jeu de chat et souris avec deux escadrons de CRS munis de deux canons à eau, effectuant des aller/retours Jaurés / Arnaud Bernard sans arriver à disperser qui que ce soit vu que les rues alentour flambent et que SM la foule les attaque régulièrement dans le dos. 
La scène du jour : un groupe d'une douzaine de baqueux charge au kiosque de presse de Jeanne d'Arc pour appréhender un gars. Toute la rue à leur droite fait demi-tour pour leur tomber dessus à bras raccourci, à coup de projectiles, de tabourets de bar, de parasols et les cow-boys fuient en emportant deux blessés chez eux. Sous le regard, 100 mètres plus loin, d'une escouade de CRS qui ne lève pas le petit doigt pour secourir des collègues qu'ils haïssent cordialement.
Notons pour les crétins ou francs salauds faisant la différence entre bons et mauvais manifestants qu'il y a là des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des lycéens, des chasubles syndicales, des fainéants, des travailleurs, en somme un bon nombre de lapins ayant décidé de devenir chasseurs, pour voir l'effet que ça fait.
À part les boulevards, les troubles s'étendent au secteur Capitole, Esquirol, Saint Pierre, Matabiau. 
Pause musicale avec tube immortel et en play-back (1978)

 


Les graffitis fleurissent.
(La foule triomphera, Consommez local, bouffez vos flics, 1312, etc.)

Le côté rigolard s'exprime dans les chants, les slogans : Il fait beau, il fait chaud, sortez les canons à eau ! Ou on voit des milliers de gens reculer face à une charge en chantant On vous a niqué ! avant de se reformer au cul de la charge. Une rumeur court sur les grévistes d'Enedis ayant coupé le jus sur les quartiers concernés et, de ce fait, les caméras de surveillance. Qu'en est-il vraiment, on va pas tarder à être fixés. À la tombée de la nuit, la ville est illuminée de brasiers. Dans la pénombre d'un éclairage public déficient, entre deux incendies, des jeunes gens dansent au son d'un accordéon sur une place libérée. Bilan de la journée : la peur, cette sainte trouille par laquelle on prétend tenir la foule s'est envolée. On dirait même qu'elle a sauté dans la tranchée d'en face.

Comme un printemps avec un millier de 19 juillet. Esprit du feu, ne nous abandonne jamais !

 


 

lundi 30 janvier 2023

Alors, comme ça l'Europe voit les Français qui ne veulent plus bosser avec stupéfaction ?

 

Estimé monsieur le patron,
je t'envoie cette lettre  
parce que j'ai été ouvrier pour toi, à la tuilerie.
J'ai bossé pour toi et ça ne m'a pas réussi. 
Je t'ai donné ma santé et ma jeunesse. 
Une vie perdue à cavaler après des factures.
Et j'ai mal aux reins
Qui ont sué tes millions.
 
Toujours à faire la même chose
pour suivre ma destinée toute tracée.
Et ce n'était pas marrant.
Même si je m'en rends compte bien tard, 
C'est le boulot qui m'a fait ça.
Je n'en suis pas satisfait et je voulais que tu le saches.
Et j'ai mal aux reins
Mes douleurs, tes millions.  
La Polla Records (1991) du LP Los Jubilados (Les retraités)

dimanche 22 janvier 2023

Henri-Paul (1959-2023)

Johnny T. et Henri-Paul T.

Je n'ai pas de foyer. Je n'ai pas fondé de famille. Je ne possède rien à part ma Gibson. Je n'ai jamais fait ça pour l'argent mais pour la musique. J'ai tout donné au rock'n roll.       
Henri-Paul Tortosa
Un jour, sa vie fera peut-être l'objet d'un livre ou, pourquoi pas d'un film. Où l'on apprendrait que Bernadette Lafont a voulu l'adopter et que Patrick Dewaere venait se dépanner chez lui.  
(Extrait du très complet article de Nicolas Mesplède in Dead Groll n°9)

Henri-Paul Tortosa a fini d'en chier au début de cette semaine. 
On vous épargnera les pénibles calembours entre Born to lose et son lieu de décès. Avant de terminer un peu, beaucoup, tristement au bord de la Garonne, le gars né en 1959 à Oran, fils de mère couturière en usine et de père parti aura joué avec les Rockets (à 12 balais), les Young Rats (managés par Marc Zermati, mentor et mauvais génie) The Maniacs (en Angleterre) et, attention les yeux :
 Johnny Thunders (avec lequel on a trop souvent limité sa carrière) Stiv Bators, Mink Deville, les Intouchables (avec sa compagne Charlotte au chant) Cosa Nostra, the Heartbreakers (re-Thunders)  les Suricats, The Mavericks et je dois en oublier un paquet. 
Il apparaît dans deux films sur la légende J. Thunders, Born To Lose et The Last Rock 'n Roll Movie ainsi que dans le film de Patrick Grandperret Mona et Moi. 
 
Dans le genre légende du rock et grand témoin, le gars se posait un peu là.  
Et même avec une santé plus que chancelante, il savait encore faire péter son riff. Une de ces dernières traces sonores, enregistrée en 2021 pour un Johnny Thunders Memorial  (one again) avec Nico à la basse et Léo à la batterie, Baby I love you des Heartbreakers.  


Il paraît que l’inénarrable Rock & Folk va lui consacrer un article. Comme dit un pote, "Dommage de ne pas se préoccuper des gens quand ils sont vivants;" Et socialement dans une dèche noire, rajouterons-nous en guise de conclusion.
Reste un mec qui avait la reconnaissance de ses collègues, de Marc Minelli à Brian James (Damned, Lords of the new Church, etc...) de Sonny Vincent à Little Bob.   
En guise de curiosité et pour illustrer la précocité de notre disparu, un reportage d'Antenne 2 qui date de 1974 ou 1975 dans lequel une bande de sales morveux s'essayent à la musique du diable.

lundi 28 novembre 2022

Pour Wilko (1947-2022)


 C'est avec cinq jours de retard que nous venons ici rendre hommage à un des personnages les plus attachants de notre panthéon rok'n rollien : Wilko Johnson.
Originaire du quartier portuaire et prolétaire de Canvey Island, notre guitar hero a changé la face du rock en deux ans et trois albums entre 1975 et 1977 avec ses complices du groupe Dr. Feelgood.
Résumons l'affaire : en ces premières années de la décennie 1970, à part quelques notables furieux, le devenir du rock est mal barré : musiciens virtuoses en quête de respectabilité devenant "progressifs", jazz rock se muant en musique d'ascenseur, hard rockeurs planqués derrière des montagnes d'amplis, glam rock rigolo et énergique mais destiné à des pré adolescents... 
Et voici quatre gars au cheveux un peu plus courts, sapés comme des employés de bureau qui retournent aux sources du blues et écument les bars pour se produire à deux mètres d'une quarantaine de personnes. Comme la presse a besoin d'étiquettes, le Pub rock (le rock du bistrot du coin) est né. D'autres suivront ce sillon (Eddie and the Hot rods, Ducks Deluxe, Count Bishop, etc.) et les jeuunes gens qui assistent à ça en profitent pour durcir le mouvement et accoucher du punk britannique.  
Les Feelgood n'ont jamais prétendu inventer quoi que ce soit ; juste redonner un coup de jeunesse via un retour aux sources. Quatre gars avec lesquels valait mieux pas plaisanter tenant la scène comme des furieux. Principal compositeur, Wilko a un jeu de scène très... particulier. Quant à sa manière de mitrailler sa Telecaster sans médiator, il a toujours confessé avoir repris le jeu de Mick Green, légendaire musicien du grand ancien Johnny Kidd.

Les voici en 1975 reprenant le Boom boom de Muddy Waters. Wilko au chant.



Et à St Pithiviers, en 1976, lors d'une séquence tournée par FR3 dans un "Going back home" filmé dans une cour d'école devant un public inhabituel.

 

Pour des raisons tenant tant à l'épuisement qu'à des divergences de consommation, Wilko abandonne Dr. Feelgood en pleine vague punk, en 1977, et joue un temps avec l'inénarrable Ian Dury avant de continuer son bonhomme de chemin en solo. 
Et de s'adonner à sa passion pour l'astronomie.
On peut l'apercevoir dans quelques scènes de la séries Game of thrones, en bourreau. En 2013, il annonce être en phase terminale de cancer du pancréas, refuser la chimiothérapie et se lance dans une mini tournée et un disque de potes avec Roger Daltrey, ci-devant chanteur des Who.

 

Pratiquant de "médecine douce", Wilko annonce être guéri de son cancer en octobre 2014. Il participe au groupe The Mutants (avec des ex MC5, Specials, Stiff Little Fingers) et sort récemment quelques titres dont ce Marijuana, ô combien prémonitoire.

  

Il s'est donc éteint chez lui le 21 novembre 2022.

mardi 1 novembre 2022

Mort d'un Killer


 Ok, c'était un exagéré : bagarreur, ivrogne, libidineux, grand amateur stupéfiants, emmerdeur patenté et provocateur né, mais que voulez-vous, on a toujours eu un faible pour les casseurs de vaisselle.
N'empêche, Jerry Lee Lewis, alias The Killer, né en 1935 et disparu samedi dernier, était le dernier des grands pionniers du rock'n roll encore présent. 
À part une culture musicale encyclopédique, le gars a produit quelques uns des meilleurs disques live de l'histoire du rock. 
La preuve, cet enregistrement de 1964 avec Great Balls of fire / You win again / High School confidential / I´m on fire / Your cheatin´heart / Whole lot of shakin´Goin´On 
 

 

So long, chap. On a encore pris un coup de vieux.

vendredi 15 juillet 2022

Évolution

 

Les habitués de ce blogue l'ont certainement remarqué, le rythme de publication va en ralentissant.
Il y a désormais un peu de dix ans, cet outil fut créé par l'ingénieux Eliott pour appuyer une défunte émission de radio. Le sus-cité étant parti vers d'autres aventures, votre serviteur l'alimenta au grès de sa fantaisie, ses découvertes, ses enthousiasmes ou ses colères.
Et puis, le monde a cavalé et ce type d'intervention sur le ouèbe, à part l'excellente raison du partage, nous apparaît de plus en plus dérisoire. Pour tout dire, on se sent un peu con de causer zizique ou culture en général quand une guerre, une crise économique maousse et une planète invivable pointent leurs sales gueules,
Sans compter ce bon vieux proverbe targui certainement apocryphe : Si ce que tu as à dire n'est pas plus beau que le silence, alors ferme ta bouche. 
Que dire d'autre sinon laisser le dernier mot à ce bon vieux Chuck (en bonne compagnie) avec un titre toujours de circonstance qui définit tellement notre présent : Too much monkey business 

 

Suivi d'une chouette version de la même par une bande de jeunes en 1963 et en direct à la BBC. Où on constate à nouveau, et pour ceux qui en doutaient, que Ringo était quand même un putain de batteur et John un authentique rocker.

 

Tout ça pour dire que c'est pas fini mais que désormais, les publications seront beaucoup moins régulières.
Sur ce, marchez à l'ombre, les gens. Et bonne saison tout de même.
Un dernier clin d’œil au camarade Eliott. 


mercredi 29 juin 2022

Héros oubliés du rock 'n roll: TV Personalities

 

En 1977, en pleine révolution punk, le chanteur et poète Dean Tracy, amoureux de psychédélisme et de pop énergique, réunit ses potes de Chelsea, Joe Foster, Ed Ball et Jowe Head (ex Swell Maps) pour un groupe déconnant, subversif, irrégulier : Television Personalities.
Non seulement, ce combo relativement parodique, sera sujet à des changements constants de personnel autour de la figure de Tracy, mais il connaîtra une carrière en dents de scie, voire confidentielle, ce qui les mènera à intituler leur troisième LP Ils auraient pu être plus gros que les Beatles, en 1982. 
Influencé par les Pistols et le lunaire Jonathan Richman, Dean Tracy s'interdit d'établir une liste de morceaux en concert, préférant compter sur la spontanéité et l'inspiration du moment. Ce qui donne le meilleur et le pire.
Trente ans avant l'arrivée du personnage du Bobo ou du Hipster dans le paysage urbain, ils se payent un succès d'estime avec le très ironique 45 tour Part time punks (les punks à mi-temps) en 1978, rengaine débile et entêtante qui fait les beaux jours du DJ de la BBC, John Peel
 
Ce qui n'empêche pas Tracy d'emprunter du pognon à sa mère pour le 45 tour suivant dont la pochette est tirée à la photocopieuse. Vu la qualité des paroles, ils seront fortement soutenus par des gens aussi variés que Joe Strummer (des Clash) ou David Gilmour (du Pink Floyd). D'ailleurs le Floyd tentera de les embarquer en première partie d'où il se font jeter par un public déboussolé.
Leur côté je m'en foutistes ne les empêche pas d'aborder quelques sujets cruciaux sous le règne de Margareth de Fer, ainsi, en référence au titre original de docteur Folamour de Kubrick, How I learned to love the bomb (1986)

 

Comme pour beaucoup d'autres, la décennie 1990 sera pour eux assez désespérante et Tracy passe par une sérieuse dépendance à l'héro et des séjours en taule pour vol. Même si une nouvelle formation a vue le jour en 2006, la poisse persiste: Dean Tracy subit une grosse opération du cerveau en 2011 et reste hospitalisé pour des années. 
Alors pour la nostalgie, une Peel Session du premier septembre 1980 avec quatre titres : Silly Girl, A picture of Dorian Gray, La grande illusion et Look back in anger.

mardi 12 avril 2022

Chris Bailey (1957-2022)

 


Il y a longtemps, on avait déjà écrit toute l'affection qu'on ressentait pour Chris Bailey, auteur, compositeur, chanteur irlando-australien.
Il nous a quitté samedi dernier à l'âge respectable de 65 ans. Respectable car le gars ne s'est pas vraiment économisé.
Que dire, à part que c'est encore une partie de notre vie qui fout le camp.
Ses parents avaient quitté Belfast en 1965 (on les comprend un peu) pour Brisbane, Coincé par l'intense vie culturelle régionale (en gros t'écoutes du hard rock ou la fanfare municipale en kilt) le petit Chris met un grand coup de pied dans la fourmilière en montant un groupe d'excités en 1974, Kid Galahad and the Eternals. Leur pub rock speedé n'ayant qu'un succès d'estime, il faut attendre 1976, et l'apparition des Sex Pistols pour que EMI, qui recherche des énervés, distribue leur premier album, proto punk rock, (I'm) stranded qui leur vaut un succès immédiat en Angleterre. Ah oui, entretemps, ils se sont rebaptisés The Saints.

S'ensuivent au moins cinq albums majeurs, un bon nombre de ruptures et de remaniements qui laisseront Chris seul membre original du groupe. Ce qui a beaucoup agacé l'ex guitariste, l'excellent Ed Kuepper, qui jouera désormais dans The Aints, manière de dire "et je t'emmerde". Ces deux là finiront par se rabibocher. Premier et quasi unique groupe de punk à inclure une section de cuivre, The Saints n'empêche pas Bailey de suivre une carrière solo plus mélancolique, plus celtique. 
Perso, on a toujours eu un faible pour le premier album sous son nom, entièrement acoustique, Casablanca (1983)

Un copain, nous rapporta l'anecdote où Chris se produisant seul dans un bar de la banlieue parisienne, un autre gars avait l'air fort impatient de participer jusqu'à ce qu'on lui dise "Vas-y Schultz, demande-lui !" Et le concert s'acheva en duo. On regrette un peu d'avoir raté ça.
So long, chap. Tu chantais toujours aussi bien.


samedi 2 avril 2022

Les infortunes de la réalité

 
La preuve en est fournie par l'affiche ci-dessus (en réalité, une photo du quartier de Vallecas bombardé par les fascistes durant la bataille de Madrid) , les fake news ne datent pas d'hier. Simplement, avant on disait bobards, propagande, bourrage de crâne, etc. Ce genre d'infamie n'est en rien l'apanage de l'extrême droite.
Mais en ce moment, pris entre la tragédie de la guerre et la tragi-comédie électorale nous sommes particulièrement gâtés.
En plus, il fait un temps dégueulasse.
Alors vous comprendrez qu'on soit un peu bougon.
Et que l'archive (1984) qui suit résume assez bien notre état d'esprit bougon.
Même si ça nous rajeunit pas. 

lundi 21 février 2022

Qui sont les Hommes chats ?

 

Le maire de l'époque a reçu de nombreux individus et plus de deux cents appels téléphoniques. Il parlait aux journalistes, aux policiers, à la Maria Teresa Campos¹, aux émissions de la télévision basque et au président de la communauté autonome de Navarre. À un tas de gens connus. Il s'est pas mal affaibli. Il ne dormait presque plus. Mangeait peu. Il était sempiternellement entouré d'étrangers et répondait à deux téléphones portables en même temps. Une chose chassant l'autre.

Qui l’eut cru ? On avait vécu avec un collectionneur. Mais celui-là ne s'était pas passionné pour les timbres ou pour les images de footballeurs. Il se contentait de nettoyer la contrée de tous ceux qui rôdaient autour de son troupeau. Il les tuait et leur tranchait les mains. Aux voleurs de bétail. Pour les conserver ensuite dans le sel. Nous, on pouvait l'entendre. On doit défendre sa propriété envers et contre tous. Mais du monde extérieur, on n'a reçu que de la merde et du venin. Ce n'était que sauvageries incompréhensibles pour les esprits comme il faut.

Qu'avec les mains, il se faisait des attouchements pas catholiques. Je ne sais quoi encore à propos de fétiches. Qu'il était complètement cinoque. Que pendant des décennies, il avait terrorisé toute la région. Qu'il était impossible que les autres n'aient rien suspecté. Qu'on avait encore peur de parler alors qu'il était mort. Qu'on était complices. Par ce qu'on s'était tus et qu'on n'avait pas voulu alerter qui que ce soit. Qu'on entravait l'enquête. Que nous vivions en pleine folie. Que vivre éloignés du monde avait fait de nous des misérables. Que si ça se trouve, c'était nous, ses propres voisins, qui avions mis le feu pour nous libérer de ce fou. Que nous représentions l'Espagne Noire. Que nous étions tous coupables. Et je ne sais combien d'autres conneries.
Josu Arteaga Histoire universelle des Hommes-chats (Nouveau Monde) 

L'auteur ne dédaigne pas taquiner la muse du rock et la mythologie du western spaghetti made in Spain.
Avec ses deux complices de la Banda del abuelo.

 

Un village enchâssé dans les brumes des montagnes basques, non loin de la frontière française. Qui se maintient à l'écart d'un monde qu'il méprise et qui l'agresse.

Un village dont plusieurs habitants sont décrits comme correspondants à un félin particulier. D'où leurs surnoms d'Hommes Chats.

Un village dont une bonne partie de la population, traditionnellement catholique, a choisi le camp des vainqueurs durant la guerre civile mais autour duquel des guérilleros anti-franquistes ont longtemps rodé.

Un village qui cache de terribles secrets. Outre les jalousies, rivalités ou haines qui se résolvent de façon tragique ou cocasse, une rumeur persistante fait état de cadavres aux mains coupées, on ne sait par qui ni pourquoi.

Jusqu'à ce que le brouillard se lève sur la scène des crimes. 
 

¹ Maria Teresa Campos : animatrice de différents talk-show de la télévision espagnole.